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17/12/2010

Les Mauté et Mathilde Verlaine.

Par Bernard Vassor

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Antoinette Flore Chariat
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Nous pouvons rectifier les inexactitudes d'une biographie, grâce à Michael Pakenham, un des verlainiens les plus éminents, qui est l'éditeur de la Correspondance Verlaine, et a préfacé aux éditions Champ Vallon les "Mémoires" de Mathilde (en 1992)
Dans ses mémoires : "Ex-Madame Paul, Verlaine, Mémoires de ma vie", l'épouse de Paul Verlaine donne une version arrangée,de sa biographie, de celle de sa famille, et de ses relations avec Arthur Rimbaud. Tout d'abord, sa mère : Antoinette Flore Chariat
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Le premier mari d'Antoinette, était le "marquis" Louis de Sivry, né en 1810. Son père Michel Sivry, exerçait en réalité la noble profession de chapelier ! Charles Erhard de Sivry est né de cette union le 17 novembre 1848. Son second prénom Erhard, le prédestinat-il à une carrière de pianiste ? Louis de Sivry mourut quatre mois plus tard.  Le veuvage d'Antoinette dura trois ans. Elle épousa en seconde noces Théodore-Jean Mauté "de Fleurville"  (mort en 1887)
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Théodore-Jean Mauté, Fleurville De Puipeu......
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Mathilde est née le 17 avril 1853 à Nogent-le-Rotrou.
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Michaël Pakenham, Correspondance générale Paul Verlaine Tome I Fayard 2005 

04/08/2010

LE DOCTEUR EDOUARD TOULOUSE, UN VISIONNAIRE

PAR BERNARD VASSOR

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ZOLA, RUE DE BRUXELLES
Le docteur Edouard Toulouse est né à Marseille en 1865. Médecin et aliéniste, fut reçu docteur en médecine en 1891 avec une thèse sur la « mélancolie sénile chez la femme ". Il fut le premier à installer à Sainte-Anne un laboratoire de psychologie expérimentale et fonda l'hôpital psychiatriqueSainte-Anne-Henri-Rousselle. Premier expérimentateur de méthodes qui consistaient à traiter les aliénés qu'il appelera "les psychopathes" comme les autres malades, à tenter de les guerir en recherchant les causes de leurs troubles. Il avait dit-il : "observé que la psychopathie semble toucher de préférence les cerveaux les mieux doués, les plus actifs." Il va alors se livrer à une étude des rapports de la supériorité intellectuelle avec la "psychopathie"

En 1895, il demanda aux plus grands hommes vivant de se prêter à des examens physiologiques et psychologiques.

Le premier à accepter avec enthousiasme, fut Emile Zola qui pendant un an fut observé palpé manipulé, mesuré sous toutes les coutures aussi bien par lui que par d'autres experts, dont le fameux Alphonse Bertillon créateur de la science anthropométrique.

C'est en 1896 que parut le premier volume de : L'Enquête, Emile Zola, j.Ed. Toulouse : Un précurseur. éditions Flammarion. Ces études nous apprennent mille et un détails de la vie intime du grand écrivain. Dans des lettres, Zola envoie sa signature "écrite de la main gauche et les empreintes de ses doigts". Puis il donne des détails sur les "troubles névropathiques"dont il souffre. Il situe l'apparition de ces manifestations de l'age de sa vingtième année. "Ils se sont produits à de longs intervallles, un an, deux ans, sous formes de colliques nerveuses très douloureuses (...) l'effort, soit intellectuel soit physique, les provoque même semble les aggraver" Dans un courrier du 1 juin 1896, il décrit :"les sensations lumineuses que j'ai cru avoir parfois la nuit, , car elles ne se sont jamais priduites que dans les lieux que je connaissais parfaitement. Je les ai de mes deux yeux et peut-être n'y a-t-il qu'une évocation, que le souvenir très intense des objets que je sais être là"

Dans une lettre du 8 juillet, il promet de donner au docteur "une lettre approuvant votre travail et vous autorisant surtout à la publier" :

 

« Mon cher docteur,Vous me soumettez le travail que vous avez fait sur mon individualité physique et morale, et vous me demandez l’autorisation de publier ce travail.j’ai lu les bonnes feuilles, elles m’ont beaucoup intéressé, en me rappelant le plaisir que j’ai pris moi-même aux si nombreuses et si longues expériences que nous avons faites ensemble ; et, certes, je vous donne bien volontiers l’autorisation que vous désirez en contresignant vos pages, comme authentiques et vraies. Cette autorisation je vous la donne d’abord parce que je n’ai eu qu’un amour dans ma vie, la vérité, et qu’un but, faire le plus de vérité possible.Tout ce que tend à faire de la vérité ne peut être qu’excellent. Et quel vif intérêt présente une étude comme la vôtre, établissant sur des données certaines, par des expériences décisives, la vraie nature physique et psychologique d’un écrivain ou d’un artiste. Le fait est une certitude contre laquelle rien ne prévaut.La contribution que vous allez apporter ainsi est définitive.Si vous ne vous mêlez pas de critique littéraire, je défie bien pourtant qu’un critique puisse négliger, après vous, les documents que vous aurez fournis sur les sujets soumis à vos expériences.Et je vous donne aussi mon autorisation, parce que je n’ai jamais rien caché, n’ayant rien à cacher. J’ai vécu tout haut, j’ai dit tout haut, sans peur, ce que j’ai cru qu’il était bon et utile de dire. Parmi tant de milliers de pages que j’ai écrites, je n’ai à en renier aucune. Tous ceux qui pensent que mon passé me gêne, se trompent singulièrement, car ce que j’ai voulu, je le veux encore, et à peine si les moyens ont changé. Mon cerveau est comme dans un crâne de verre, je l’ai donné à tous et je ne crains pas que tous viennent y lire. Et quand à ma guenille humaine, puisque vous croyez qu’elle peut être bonne à quelque chose, comme enseignement et comme leçon, prenez la donc: elle est à vous, elle est à tous. Si elle a quelques tares, elle me semble pourtant qu’elle est assez saine et assez forte pour que je ne sois pas trop honteux d’elle. D’ailleurs qu’importe j’accepte la vérité.Enfin cette autorisation, je ne vous la donne pas par quelque malin plaisir. Savez-vous que votre étude combat victorieusement l’imbécile légende. Vous ne pouvez ignorer que depuis trente ans on fait de moi un malotru, un bœuf de labour, de cuir épais, de sens grossiers, accomplissant sa tâche lourdement, dans l’unique et vilain besoin du lucre. Grand dieu ! moi qui méprise l’argent, qui n’ai jamais marché dans la vie qu’à l’idéal de ma jeunesse Ah! Le pauvre écorché que je suis, frémissant et souffrant au moindre souffle d’air, ne s’asseyant chaque matin à sa tâche quotidienne que dans l’angoisse, ne parvenant à faire son œuvre que dans le continuel combat de sa volonté sur son doute.Qu’il m’a fait rire et pleurer des fois le fameux bœuf de labour Et si je ris aujourd’hui c’est qu’il me semble que vous l’enterrez, ce bœuf là, et qu’il n’en sera plus question, pour les gens de quelque bonne foi.Donc merci mon cher docteur. Merci d’avoir étudié et étiqueté ma guenille, je crois bien que j’y ai gagné. Si elle n’est point parfaite, elle est celle d’un homme qui a donné sa vie au travail et qui a mis pour et dans le travail, toutes ses forces physiques, intellectuelles et morales. Bien cordialement à vous.Emile Zola Paris 15 octobre 1896»

 

 

20/04/2010

Marie Dorval au cimetière du Montparnasse

Par Bernard Vassor

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La tombe de Marie d'Orval (1798-1849) est entretenue chaque année par les soins de la "Société des Amis d'Alexandre Dumas" sobrement recouverte de lierre.

L'initiative de l'entretien, selon les voeux de Dumas père, en revient à Alain Decaux en 1991 qui a fait restaurer la tombe du cimetière du Montparnasse.

Dans La dernière année de Marie Dorval publié sous la forme d'une lettre adressée à George Sand en 1855, Dumas retrace les derniers moments de cette actrice, tombée dans la misère et l'oubli à cette époque. Elle consacre sa vie à son petit-fils Georges qui mourut à l'âge de quatre ans et demi. Terrassée par la douleur, elle ne trouve plus d'engagements et passe son temps à pleurer au cimetière. Sa santé se détériore au point qu'un jour, elle est prise d'un violent malaise. Son gendre René Luguet la reconduit chez elle à Paris où, sentant sa mort prochaine, elle fait venir son ami Alexandre et lui fait promettre de ne pas la laisser dans la fosse commune. Dumas remue ciel et terre pour trouver les 500 francs pour l'obtention d'une tombe provisoire. Victor Hugo met la main à sa poche et donne une partie de la somme nécessaire (qu'il retenait généralement avec des élastiques)

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"Luguet se débat avec Dumas pour obtenir des fonds. Une représentation théâtrale est donnée au profit de Dorval et de ses enfants, mais la somme recueillie est dévorée par les huissiers. La situation est désespérée et le terme de la concession mortuaire approche. Aux abois, Luguet parvient à mettre en gage les dernières reliques de la défunte et réunit la somme nécessaire pour faire enterrer Marie Dorval dans la tombe de son petit-fils. L'exhumation est particulièrement éprouvante, Luguet découvre avec stupeur le corps de Marie encore intact malgré les cinq années passées en terre. Dumas apprend les derniers efforts de Luguet pour honorer la promesse que lui-même avait faite à Marie de lui éviter la fosse commune. Il rédige ce petit document relatant la dernière année de Marie Dorval et lance un appel à la générosité du lecteur.

Cet appel à la générosité du lecteur a porté ses fruits. Grâce aux dons, Caroline et René Luguet ont pu récupérer les quelques souvenirs déposés au Mont-de-piété; il a également été possible d'ériger un monument simple et dépouillé sur la tombe de Marie Dorval et de Georges.

Delphine Dubois

sur le site des Amis de Dumas père :http://www.dumaspere.com/pages/dictionnaire/derniere_anne...

18/04/2010

Le café Certa du passage de l'Opéra et les Dada.....

Par Bernard Vassor

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« Il n’y a personne des Dadas monsieur !»,

répondait la caissière du café Certâ  à Aragon quand il appelait un ami au téléphone. Le passage de l’Opéra qui reliait le boulevard des Italiens (6), à la rue Le Peletier (8), comportait deux galeries (de l’Horloge, et du Baromètre).

La partie dite passage de l’Opéra avait été formée lors de la construction de « l’Académie Royale de Musique », et communiquait de la galerie du thermomètre jusqu’à la rue Pinon, emplacement actuel de « l’Hôtel des ventes Drouot rue Rossini ».
Elles avaient été ouvertes par le Vicomte Morel de Vindé, pair de France, le 21 juillet 1822 et le 16 avril 1823. La largeur de ces galeries était de 3,74 mètres.

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Depuis le second Empire, ce passage était réputé pour ses « marcheuses », « le théâtre pornographique de Chirac », ses pâtisseries, ses restaurants et de nombreux cafés d’écrivains, dont le plus célèbre a été le Divan Le Peletier. C’est dans une de ses galeries, la galerie du Baromètre, qu’un basque nommé Certâ avait ouvert un café qui passa à la postérité. Le décor était sommaire : des tonneaux autours desquels des tabourets cannés et des fauteuils de paille composent le seul ameublement. La fin de la guerre de 1914-1918 vit arriver des intellectuels étrangers, faisant de Paris la capitale des arts.
C’est ainsi que le roumain nihiliste Tristan Tzara, Max Ernst, Jean Arp, Fraenkel, vont, après le Manifeste Dada de 1918, former un groupe et se lier avec Aragon, Breton, Reverdy, Eluard, Picabia.

Georges Auric a fait le récit suivant de la première réunion au « Certâ »Tzara assistant incognito à la réunion :
Cela se passait en janvier 1920, et Breton m’annonça soudain, comme s’il s’agissait d’un événement inespéré et d’une sorte de cérémonie initiatique (...) * « Vous devriez venir au Certâ vers la fin de l’après-midi, il y aura quelqu’un... Oui quelqu’un je vous promet [sic ?] une belle surprise !, lui dit Breton, qui poursuit : Cela va être intéressant cette visite de Tzara, nous venons de nous rencontrer et tout de suite il m’a alerté : surtout, n’apprenez à personne que je suis là. Je vais aller dans ce café, m’asseoir directement à une table, voir nos amis et leurs têtes, les observer.
A cette réunion étaient également présents Drieu, Gonzague-Fric, Radiguet et vraisemblablement Henri de Montherlant.
De ce bistro furent fomentés les actions symboliques : le procès de Barrès, les attaques et « manifestations dérisoires et légendaires » comme « la visite à Saint-Julien-le-Pauvre » le 14 avril 1921.
Le vendredi était le jour de lecture de poèmes avec pour participants Apollinaire, Cendrars, Reverdy, Max Jacob. Des comédiens participaient aussi à ces lectures dont Marcel Herrand, (le formidable Lacenaire des « Enfants du Paradis »)

Les coups de pioches ont eu raison du passage de l’Opéra pour le percement du boulevard Haussmann en 1923, exit le théâtre de Chiracet le petit bistro de la galerie du baromètre.

Sources :
Journal des Goncourt éd.Laffont
Aragon, Le Paysan de Paris
Alain Rustenholz Paris des avant-gardes Parigramme 2004
Archives de Paris.
Archives privées.

*"A son arrivée à Paris, Tzara était attendu comme on aurait attendu Rimbaud cet adolescent sauvage ».

Aujourd’hui, le Certä se trouve au 5 rue de l’Isly. Sur ce même site, vous avez un article du mois de septembre 2006 avec une photo des lieux actuels.

mise à jour le 18/04/2010

Plus fort que le Saint-Suaire de Turin? Une photographie de Rimbaud âgé !!! *

Par Bernard Vassor

Une affaire bien juteuse :

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"Depuis la nouvelle qui a bouleversé le pays" peut-on lire entre autres articles plus abracadabrabtesques et pioupiouesques les uns que les autres. Une bien juteuse affaire avec une scénographie digne du" mausolée de Lénine" et vendue pour une somme astronomique une demi-heure après l'ouverture du salon à un mystérieux collectionneur "bien moins cher que Spiderman qui a atteint la somme d'un million de dollars il y a quelques jours !" d'après un des vendeurs sur cette vidéo : http://www.dailymotion.com/video/xcz736_ils-ont-decouvert...

En effet, il a une drôle de tête le personnage à côté du clown en pyjama à carreaux : le regard torve, la bouche ouverte avec sa fine moustache de trafiquant d'armes les yeux fixés sur l'objectif contrairement aux autres personnages qui regardent délibérément ailleurs.

Comme chaque année, J.J.Lefrère nous offre une exclusivité mondiale....

Précisons une nouvelle fois qu'Aden ne se trouve pas en Abyssinie, du moins pas encore et que n'est pas Vrain-Lucas qui veut.

*Certains nous ont promis pour bientôt le crâne d'Arthur Rimbaud enfant.

07:27 Publié dans HISTORICO-LITTERAIRE | Tags : vrain-lucas | Lien permanent | Commentaires (0) | | | | Digg! Digg

12/04/2010

Ernest Daudet, et la Dame de Pique.....

Par Bernard Vassor 

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Le commissaire de police du 9° arrondissement Ernest Daudet avait été maintenu en place après la Commune de Paris au commissariat de la rue du faubourg Montmartre 25, mieux il avait été promu auxiliaire du Procureur de la République ce qui laisse supposer que sa conduite fut exemplaire

pendant la Commune de Paris, et la répression sanglante versaillaise pendant la semaine du même nom ! 

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Dans le procès-verbal mentionné plus haut, le commissaire fait état d'une saisie opérée chez un libraire, le sieur Vavrand Pierre dans son échoppe du 1 rue Bréda (aujourd'hui rue Henry Monnier). L'objet du délit était un journal satirique sans nom d'imprimeur intitulé

La Dame de Pique : "Nous nous sommes rendus accompagné d'un inspecteur du service du Contrôle Général, rue de Bréda N°1, chez le sieur Varand Pierre libraire où nous avons saisi deux exemplaires de l'écrit en question exposé à la porte de la boutique. La dame Varand nous a déclaré que ces deux exemplaires lui ont été remis il y a deux ou trois jours et qu'elle n'en a pas vendu".

L'opération s'est déroulée le 5 septembre 1872.

La République de monsieur Thiers n'avait rien à envier en matière de censure et de répression à l'empire de monsieur Badinguet.

Source : archives de la préfecture de Police.

Mise à jour le 16/12/2010 

29/06/2009

Le Grand Guignol : à Montmartre le soir

Par Bernard Vassor

Le "théâtre du Grand Guignol" d'Oscar Méténierfit appel à Jules-Alexandre Grün pour la publicité de ses premières représentations.

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Un épisode cocasse au théâtre de la rue Chaptal

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Un chien de commissaire, Oscar Méténier.

Dans les locaux de l’ancien Théâtre-Salon, 20 bis rue Chaptal, on pouvait noter à l’affiche, les noms de Georges Courteline, Jean Lorrain et Oscar Méténier.
La censure s’abattit sur le théâtre, interdisant la programmation de certaines pièces.
Georges Courteline avait porté plainte contre le ministre, Méténier lui, avait utilisé un subterfuge : il faisait sortir le public à la fin des pièces autorisées, puis il l’invitait à rentrer de nouveau à guichets fermés sur invitation personnelle, pour assister à l’adaptation d’une pièce de Maupassant qui était le principal grief retenu par Anastasie. Malgré cela, le Grand-Guignol fut rouvert avec autorisation de jouer Mam’z’elle Fifi.

Oscar etait le fils d'un commissaire de police, lui même secrétaire du commissariat de la Roquette, ses amis l'avaient surnommé « le chien de commissaire. »
Chassé de son poste, Méténier fut remplacé par une autre personnalité montmartroise : Emile Reynaud.

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Il allait écumer Montmartre en compagnie de ses compagnons de beuveries d’orgies, et de consommation de stupéfiants de toutes sortes, de l'ether à l'opium. Chaque plaisir avait son lieu d’élection : les brasseries de femmes pour femmes, les brasseries de femmes pour les deux sexes.
Parmi les membres de ce cénacle, Liane de Pougy, medium_Liane_de_Pougy.jpgRachilde et Sarah Bernard figuraient en bonne place.

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 medium_Rachilde_Marguerite_Eymery_dite.jpgDans « La vache enragée » Jean Lorrain l’historiographe des bas-fonds raconte :
-« C’était dans Montmartre de longues flâneries, du matin au soir, cigarette aux lèvres, des halles au Rat Mort, en compagnie de petites femmes à cheveux courts, des stations et des beuveries dans le cafés de la rue des Martyrs, pour aller s’échouer dans l’atelier d’un peintre ami. Le soir on montait la rue des Abbesses ou des Trois Frères, et c’étaient d’interminables errances dans les inextricables ruelles qu’occupent aujourd’hui les assises du Sacré-Cœur »

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Thibaut d'Antonay, Jean Lorrain, Miroir de la Belle Epoque, Fayard 2005
Photo : à gauche, Liane de¨Pougy
à droite Marguerite Emery dite Rachilde
PORTRAITS DE METENIER PAR LAURENT TAILHADE ET LEON DAUDET :
http://freresgoncourt.free.fr/portef2001/PortfOct/metenie... 
Laurent Tailhade, G. Crès et Cie, 1921 Extrait de Petits Mémoires de la vie Extrait de Petits Mémoires de la vie :
En ce temps, l'auteur de Monsieur Betsy, de Madame la Boule, des Frères Zemgano et autres œuvres exemptes d'idées générales, discernait à peine l'orient de son étoile, dans les brumes du futur. Il sortait du régiment. Sa belle écriture, sa faconde opiniâtre, sa vulgarité, son outrecuidance naïve et couronnant le tout, un incassable respect de l'ordre établi, en avaient fait le parangon des sergents-majors. Dans le civil, encore que vêtu comme n'importe quel rond-de-cuir, il n'avait pas abdiqué toute allure militaire. Sanglé dans son harnais, il gardait je ne sais quoi de fringant et d'avantageux qui décelait en sa personne l'irrésistible sous-off. Secrétaire du commissaire de police pour le quartier Saint-Jacques, il préludait à sa carrière intellectuelle par l'exercice d'une fonction, héréditaire chez les siens. En effet, M. Méténier le père avait pris 0scar dans ses bureaux de la rue Jean-de-Beauvais.Ainsi l'instruisait-il dans les arcanes de son art. En dépit du prénom ossianesque dont il était affublé, Méténier junior n'avait en lui rien de gaélique ou de pensif. Petit, remuant, agité d'un tracassin perpétuel qui ne le laissait pas dix minutes en place et le faisait rebondir, de droite à gauche, comme un escarbot effaré, c'était un jeune homme sans jeunesse, le poil brun, les yeux du même, inexpressifs et ronds, la peau huileuse, avec le teint noir jaune des hépatiques, des dents superbes qu'il ne soignait guère, une moustache soldatesque et pommadée, un chef en boule, au menton fuyant, sans reliefs ni méplats. Tel apparaissait Oscar Méténier dans la fleur de son avril. C'était, en outre, un bavard effroyable. Ni l'heure, ni l'intervention d'étrangers, ni le désir avoué de rompre l'entretien ne parvenaient à lui imposer silence ; dès qu'il avait pris la parole et mis la main sur sa victime, c'en était fait. D'une voix de crécelle, enrouée et criarde tout ensemble, d'une voix étrange qui ne sortait des lèvres ni de la gorge et semblait tamisée à travers une pratique de polichinelle, sinon par le rauque gosier d'une effraie en chasse, il verbigérait, sans ponctuer ses phrases ni prendre haleine, pendant une longue suite d'heures, toujours dispos, toujours en forme. Il parlait comme le chien aboie à la lune. Il parlait comme la mer monte ou comme il pleut.
Vers 1885, on le rencontrait chez un manœuvre de lettres, Charles Buet, lequel, chaque semaine, groupait autour de lui, dans son appartement de la rue de Breteuil, un monde paradoxal et bigarré. Méténier, heureux de se produire à des confrères hors de page ou renommés pour avoir d'utiles accointances, bourdonnait, caracolait, coinçait les gens entre deux portes et les submergeait sous le flot de ses discours. MM. Félix Fénéon, Victor Margueritte, moi-même, et, parmi les morts, Jean Moréas,formions un auditoire qu'il aimait. Son esthétique, bientôt, n'eut plus de secrets pour nous. Les rapports de police l'avaient illuminé. À déguster cette prose forte qui sent le cuir, l'aramon, le tafia, la pipe et le sergot, il avait compris, d'un seul coup, l'essentiel du Naturalisme, la beauté du langage primaire ; il avait aspiré à l'Art simple et véritablement plébéien, en un mot, à l'Art sans art et mis au niveau du premier venu. Ces palabres, fort avant dans la nuit, se prolongeaient sur l'Esplanade, le long des quais, jusqu'à nos logis respectifs. Quelque intimité en fut bientôt le résultat, au point que Méténier, un beau soir, invita Moréas, M. Fénéon,peut-être aussi M. Victor Margueritte et moi, à passer l'après-midi ainsi qu'à dîner avec sa famille, le dimanche suivant. Il nous promettait la lecture d'une ou deux pièces, écrites pour le Théâtre Libre, suivant les canons du réalisme le plus intransigeant. En outre, il devait nous communiquer les rares éditions, les livres curieux, légués avec sa bibliothèque de travail, par un sien parrain ouvert aux choses de l'esprit.
La jeunesse est imprudente. Nous acceptâmes. Vers deux heures, donc, au jour dit, nous frappions à la porte d'Oscar. Il vint, nous introduisit dans son cabinet de travail. C'était la pièce d'apparat ; on sentait que le grand homme de la famille, gloire de la gent Méténier, se prénommait Oscaret que, désormais, tout cédait au bien-être du grand homme, concourait à la mécanique de ses élucubrations. La journée était froide. Un admirable feu de bûches rayonnait dans l'âtre et disposait aux vagues somnolences d'une causerie à bâtons rompus. Mais notre hôte ne l'entendait pas ainsi. La lecture ne fit point défaut. Pendant trois heures d'horloge, sans même que le lecteur eût pris un verre d'eau, nous entendîmes, outre les deux actes du programme, de copieuses nouvelles ; en même temps, le scénario d'un roman-feuilleton. Déjà, cependant, l'auteur aspirait à de plus hautes aventures. Ne sachant pas le russe, mais déjà certain de parler aussi bien que le français la langue tolstoïenne, il projetait de traduire, pour M. Antoine, la Puissance des ténèbres dans le verbe imagé de «la Zone», item de mettre à la scène un roman des Goncourt. L'un de nous, alors, gravement lui suggéra de ne pas s'attarder en si beau chemin, d'étendre, sur Athalie et Mithridate ses bontés, qui ne pouvaient que gagner à être mis dans un français tellement nouveau. À cinq heures et demie, Mme Méténier, la mère, vint installer, devant le feu entretenu diligemment, une vaste coquille, ainsi qu'un tournebroche à mouvement d'horlogerie où s'ajustait une dinde (elle disait «un» dinde) pantagruélique de la plus belle apparence. En peu de temps, la peau du volatile se boursoufla, tandis que ruisselait le beurre et qu'une forte odeur de rôti pénétrait nos vêtements et nos cheveux. Cela n'arrêta pas Oscar de poursuivre sa lecture, jusqu'au temps que, la dinde cuite à point, il nous fallut gagner la table et nous mettre à dîner. Pendant le repas, la lecture ne fut pas tout à fait interrompue. Oscar, à chaque instant, négligeait sa volaille pour aller chercher un livre, un cahier, nous demander notre avis sur quelque point de «gay-sçavoir». Et je songeais à l'épigramme de Martial, plus aisée à citer qu'à traduire, contre Ligurinus : Et stanti legis et legis sedenti, - Currenti legis et legis cacanti. - Ad cænam venio fugas sedentem. - Lassus dormio :: suscitas jacentem !*

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Les années d'apprentissage furent courtes pour Méténier. Comme Pierre Loti, mais cependant moins artiste que l'auteur d'Azyadé, il se glorifiait, à bon droit, de ne savoir aucune chose. En récompense de quoi le succès ne se fit pas attendre. On était alors en pleine ferveur naturaliste. À peine si, dans quelques feuilles d'avant-garde, la réaction de l'École décadente se faisait pressentir. Les lis du Symbolisme étaient encore à l'état de caïeux. Le Théâtre Libre, un peu plus tard les Variétés, où Réjane, comédienne sans égale, José Dupuis, d'autres encore, dignes de ces protagonistes, défendirent l'œuvre d'Oscar, n'enregistrèrent pour lui que des triomphes. Il avait, en effet, vu juste : «Pas d'idée et pas de style ! Cela suffit pour atteindre à la notoriété comme à l'argent.»
Le succès n'avait pas ennobli, - ce qui parfois arrive, - le caractère du garçon. Peu de temps après Monsieur Betsy, nous somnolions, quelques amis et moi, le nez dans notre bière, pendant un entracte du Chat-Noir. Entre Oscar, escortant avec force courbettes Camille Lemonnier. Son déplaisir ne fut pas petit de nous rencontrer en cet endroit. Après nous être divertis quelques moments de son embarras, de ses efforts pour cacher le grand homme et se cacher lui-même, nous abordâmes Camille Lemonnier que nous connaissions depuis dix ans pour l'avoir, à Bruxelles, rencontré souventes fois chez notre maître et glorieux ami Edmond Picard. Une poussée intense de bile rendit encore plus jaune le sourire d'Oscar !
Puis ce fut le Grand-Guignol, avec les représentations où l'«inouïsme» d'antan était remplacé par le scandale et par l'horreur : Dupont l'Anguille et tout ce qui s'ensuit ; ce fut encore la liaison tapageuse avec Lantelme, où la délicieuse enfant échangeait, avec son premier amour, des coups de poing, même des coups de chaise ; Méténier, directeur de théâtre et notable commerçant, le «quart d'œil» de 1884 devenu «physionomie parisienne» et boulevardier notable, comme on disait alors.
Puis ce fut le dénouement, lugubre, attristant et malpropre, l'infortuné mourant du mal qui emporta Maupassant, Baudelaire, pour ne citer que des noms immortels. Mais ce n'est pas la hideuse maladie, hélas ! qui confère l'immortalité.
Peu de temps avant sa mort, je le rencontrai dans le train de Passy. Il habitait Courcelles-Levallois. Sans trop d'efforts, il me reconnut et de meilleure grâce qu'au Chat-Noir. Déjà, car sa maladie était fort avancée, il cherchait ses mots, balbutiait les fins de phrases. Mais il bavardait comme autrefois, ne permettant pas qu'on plaçât un mot. Il rapportait un sac plein de bananes qu'avec l'incoordination des mouvements, caractéristique de son état, il répandit sur les banquettes, le tapis du wagon, entre les pieds des voyageurs. Or ce fut un lamentable spectacle de le voir, chancelant et mal d'aplomb, courir après ses fruits que les lacets du train faisaient rouler de côté et d'autres. Il se désolait comme un enfant. Tout le wagon, - ainsi que les fourmis d'Apulée, pour les perles de Psyché, - se mit en devoir de recueillir ses bananes. Quand le convoi stoppa gare de Courcelles, Oscar était enfin consolé.
Je ne l'ai pas revu depuis. Peu de temps après cette rencontre, je reçus, de sa main, une lettre où ne subsistaient plus que des vestiges graphiques. Sous le même pli, quelques lignes de Mme Méténier - la mère - me priant d'aller voir son fils. Puis, le lendemain, contre-ordre. Elle craignait l'émotion, - disait-elle, - d'une visite, la surprise et tout ce qui s'ensuit. La bonne dame redoutait - possible - une captation de testament in extremis. En tout cas, les lauriers étaient coupés et les beaux jours du dinde révolus.
Léon Daudet, devant la douleur, (deuxième série des Souvenirs des milieux littéraires, politiques, artistiques et médicaux). Cité selon Léon Daudet, Souvenirs et Polémiques, R. Laffont, coll. «Bouquins», 1992, p. 210.
Oscar Méténier, camarade et collaborateur du précédent [Paul Alexis] était petit, noiraud et pétulant. Chien de commissaire de police, il se servait de sa fonction pour tirer d'ennui à l'occasion les copains aventurés comme Jean Lorrain et aussi pour documenter ses romans-feuilletons et ses pièces réalistes. Fureteur, cancanier, inventif, il nourrissait Edmond de Goncourt d'anecdotes plus ou moins authentiques, qui sont demeurées consignées dans le Journal. Même quand leur auteur n'est pas nommé, je le reconnaîtrais entre mille. Dès qu'il est question des bas-fonds de Paris, des mœurs des apaches et de leurs compagnes, ou de quelques vices «estranges et espouvantables», c'est que Méténier a passé par là. Il appartenait au genre dit «tournée des grands-ducs». Il aurait fait un chef d'informations incomparable pour la rubrique des faits divers ; il en aurait certainement rajouté.

Un Théâtre comique d'épouvante !

Grand Guignol meutrière de 19 ans.jpg
Méténier est un petit homme
Actif, ardent et convaincu,
Frétillant et pétillant comme
S'il avait le feu au cul
Aristide Bruand
......
Suite de la notice du 12 juin 2006 :
C'est dans une impasse de la rue Chaptal au 20 bis, que Oscar Méténier achèta un théâtre ( le Théâtre-Salon ) en 1896 pour y faire jouer ses pièces Grand guignol hauteur.jpgqui étaient refusées sur d'autres scènes. Compagnon de débauche de son ami Raitif de la Bretonne, il fréquentait aussi Edmond de Goncourt qu'il nourissait de ses anecdotes plus ou moins authentique, que Goncourt notaient complaisament dans son journal. Oscar Méténier, comme son père, avait été "chien de commissaire", c'est à dire secrétaire général d'un commissariat de quartier (secrétaire du commissariat de la Roquette). Cette fonction lui fut très utile par la suite pour assurer l'impunité pour des amis dans l'embarras, quand d'aventure, ils se trouvaient en fâcheuse position dans des lieux de débauche et de vice dont Méténier et ses amis étaient les clients assidus, des bars louches, des maisons borgnes, et des lupanars homosexuels. Il était né 1859, il est mort à Saint-Mandé en 1918.
Elève dans un collège de jésuites à Bourges,Méténier s'engagea dans l'armée à l'âge de 18 ans.
Ensuite, son père le fit entrer dans des commissariats de police, dans le onzième arrondissement, aux Batignolles, puis à Montmartre. Ce qui lui donna l'occasion de cotoyer les endroits chauds de la capitale.
Chien de commissaire ! Sa fonction de secrétaire d'un poste de police, consistait à assister le commissaire dans toutes ses fonctions, des saisies immobilières, de constat de crimes, et de la présence officielle des autorités aux exécutions capitales, qui lui donneront par la suite matière à spectacle....grand-guignolesque, de têtes coupées, de crimes atroces et sanguinolents. Inspiré par ses amis, Lorrain, Bruant, et Maupassantqui fut un précurseur en organisant chez lui à La Guillete, une farce inspirée par un crime commis à Montmartre. Il avait invité deux cents personnes une nuit, pressées dans l'allée de sa maison devant une gigantesque toile représentant une femme nue, pendue par les pieds. Sortant de l'obscurité jaillit un faux sergent de ville s'arrêtant, et observant le cadavre. De vrais cheveux avaient été collés sur la toile, le policier la palpe, la saisit par les nattes, et sortant un stylet, il lui ouvrit le ventre, devant les dames horrifiées, du sang de lapin gicle de la plaie.....
Grand-Guignol était né !
Fin de la deuxième partie

07/06/2009

Nana , chez Laure, la table d'hôte de la rue des Martyrs

Par Bernard Vassor

Nana Table d'Hôte Laure Piedfer rue des Martyrs hauteur.jpg
Nana chez Laure Piedfer rue des Martyrs.
Alfred Delvau, dans un de ses ouvrages sur les plaisirs de Paris, décrit la table d'hôte bien réélle de Madame Taillandier rue des Martyrs.
Des recherches aux archives de Paris devraient permettre de retrouver le numéro. "Les habitués de la table d'hôte de Madame Taillandier, rue des Martyrs, appartenaient presque toutes à cette catégorie d'actrice galantes devenues simples spectatrices des galanteries des autres, en mettant leur expérience des choses et des hommes à la disposition de qui en a besoin (...) les vieilles lunes parisiennes qui ne vont pas chez Madame Taillandier honorent de leur présence une autre table d'hôte du même genre, située rue Notre Dame de Lorette"
Emile Zola dans son roman fait monter Nana pour manger avec son amie Satin chez "Laure Piedfer", la table d'hôte de la rue des Martyrs où le dîner cooûtait trois francs :
"Les trois salons étaient encore vides. Elles se placèrent à une table, dans le salon même où Laure Piedfer trônait, sur la haute banquette d'un comtoir. Cette Laure était une dame de cinquante ans aux formes débordantes, sanglée dans des ceintures et des corsets. Des femmes arrivaient à la file, se haussaient par dessus les soucoupes, et baisaient Laure sur la bouche, avec une familiarité tendre; pendant que ce monstre, les yeux mouillés, tâchait, en se partageant, de ne pas faire de jalouses"
C'était vous l'avez compris, un lieu exclusivement féminin. Les trois salons pouvaient contenir une centaine de femmes venues là pour se restaurer, ou bien faire des conquêtes. Zola, une fois de plus en moralisateur ne cache pas son dégoût.
"Il y avait là une centaine de clientes, mêmées au hasard des tables, la plupart touchant à quarantaine, énormes, avec des empâtements de chair, des bouffissures de vice noyant les bouches molles; et au milieu de ces ballonnements de gorges et ventres, apparaissaient quelques jeune filles minces, l'air encore ingénu sous l'effronterie du geste, des débutantes levées dans un bastringue et amenée par une cliente chez Laure, où le peuple des grosses femmes, mis en l'air à l'odeur de leur jeunesse, faisaient autour d'elle une cour de vieux garçons inquiets, en leur payant des gourmandises"
Il y avait très peu d'hommes "l'attitude humble sous le flot envahissant des jupes"
Comble de la perversion pour le pudibond auteur de Nana "parmi cette foule très mélangée, où des robes déteintes, des chapeaux lamentables s'étalaient à côté de toilettes riches dans la fraternité des mêmes perversions. Intéressée par un jeune homme, aux cheveux courts et bouclés, le visage insolent, tenant sans haleine, pendue à ses moindres caprices, toute une table de filles, qui crevaient de graisse. Mais, comme le jeune homme riait, sa poitrine se gonfla. -Tiens c'est une femme ! laissa-t-elle échapper dans un léger cri...Nana fit une moue dégoûtée"
La scène prend fin quand Nana "jeta ses six francs à Laure, qu'elle méprisait à cette heure plus que la boue des ruisseaux"

05/03/2009

Une promenade au dix-neuvième siècle sur les pas des frères Goncourt

Par Bernard Vassor

Goncourt l'eclipse hauteur.jpg
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Un voyage à l’envers, "du 1 rue Laffitte au 43 rue Saint Georges",

pour paraphraser le titre d’un article du Journal Paris-mercredi.

Démarrons notre promenade au 1 rue Laffitte, dans la cour du restaurant « La Maison Dorée », où différentes rédactions de journaux se sont succédées. La première feuille, a été après février 1848, l’Evènement , fondé par Froment-Meurice, avec son frère Paul Meurice pour directeur et Charles et François Hugo, ce qui donne une idée de l‘orientation politique de cette publication. Supprimé après le coup d’Etat du 2 décembre, un quotidien littéraire est créée par un cousin des frères Goncourt qui prendra sa suite dans ses locaux, le Journal « Paris » qui était titré Paris-lundi, Paris-mardi, chaque jour de la semaine définissait le titre. C’est le mercredi que Jules et Edmond fournissaient leurs articles. Revenons sur le boulevard des Italiens, la maison mitoyenne qui occupe l’angle de la rue Laffitte est le glacier Tortoni (1804-1894). Sur le trottoir d’en face  était l’hôtel de Brancas dessiné par Belanger occupé par la marquise d’Hetford et de Lord Sémour. Nous revenons sur nos pas, en traversant la rue Laffitte, au numéro 2 le superbe Hôtel d’Aubeterre du XVIII° siècle, avec un perron et quatre marches est la propriété de Lord Hedford en 1820. A quelques pas, à l’angle de la rue Lepelletier (numéro 1 hôtel de Bospin sous Louis XVI), le concurrent direct des frères Verdier (patrons de la Maison Dorée) se trouvait le café Riche.  Au 1 de la rue Lepelletier, étaient installés les bureaux du National, au numéro 2 chez un nommé Salmon, était logée  la Saint-Huberty* ( Antoinette-Cécile Clavel). Il nous faut un peu d’imagination pour imaginer, à la place de l’immense immeuble de style Art déco, construit pour la Bnp Paribas lors du percement du boulevard Haussmann : rue Lepelletier, au 5 hôtel Terray de Rozières***(1738)

au 7 l'Hôtel de la duchesse d’Albuféra, veuve de Suchet, au 9 le compositeur dramaturge Grétry y habita, au 11 , le salon des Italiens, le premier cercle fondé sous Louis XVI , au numéro 12, une galerie du passage de l’Opéra (1833), ouvert sur l’hôtel de Gramont. En revenant sur le boulevard des Italiens où la deuxième galerie du passage de l’Opéra, conduisait à l’entrée de l’Opéra Lepelletier.

…..

En nous tournant vers les numéros impairs, était à l’angle de la rue Favart, « la Librairie Nouvelle lieu de rendez-vous à jour fixe des Goncourt avec Flaubert,  Roger de Bauvoir et Théophile Gautier, les élégantes pour se donner un vernis culturel, venaient s’y montrer. Le financier Mirès, venant de Bordeaux arrive à Paris en 1836. Il s’associe à un autre bordelais Polydore Millaud. L’ascension des deux hommes est fulgurante. Mirès propriétaire de l’Hôtel des Princes rue de Richelieu et de maisons boulevard des Italiens, fit percer un passage au numéro 7....

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Reprenons notre voyage avec Mirès qui venait de marier sa fille avec le prince de Polignac. Après ces noces, l'Empereur lui remit la Légion d'honneur. Haussmann signa un arrêté autorisant l'ouverture au  public du passage qui porta le nom de Passage Mirès. Malheureusement pour lui, l'ascension de ce baron de la finance va être stoppée net  en décembre de la même année par la plainte d'un baron italien nommé Pontalba . Mirès malgré ses relations fut condamné à 5 ans de prison. Le public débaptisa alors le passage pour le nommer Passage de Mazas....puis passage des Princes. ( Hortense Schneider qui triomphait au théâtre des Variétés, avait bénéficié pour d'autres raisons du même surnom de….. Passage des Princes, allez savoir pourquoi ?)  A l'angle du boulevard et de la rue de Richelieu, un des plus anciens cafés : le Cardinal rendu célèbre par le baron de Saint-Criq.

En nous retournant, essayons d'oublier l'immeuble de la Bnp Paribas pour nous retrouver avant le percement du boulevard Haussmann, à l'époque où le boulevard des Italiens rejoignait la rue Drouot. La maison d'angle appartenait au Duc de Choiseul , cette voie était alors la rue Grange Batelière, ce qui fait que bien des maisons ont changé de rue sans changer de place, d'où les nombreuses erreurs des historiens de Paris dont celle de la société historique de la ville qui a situé la demeure de la Taglioni et fait mettre une plaque au numéro 4 de la rue Grange Batelière. Marie Taglioni a bien vécu dans un appartement donné par le Marquis de las Marismas del Guadalquivir au 4 rue Grange Batelière (vous suivez jusqu'ici ?) mais cette portion de rue était devenue la rue Drouot en 1847, donc Marie Taglioni a bien vécu au numéro 4 de l'actuelle rue Drouot . Pour simplifier les choses, la petite portion de rue qui s'appelait rue Pinon dans la prolongement de la rue Grange Batelière fut baptisée rue Grange Batelière avant de devenir la rue Rossini, ouf.....

A  l'angle de la rue Grange Batelière, donc au rez-de-chaussée, le père de Victor Schoelcher avait un grand magasin de porcelaine. Juste au dessus, les salons du Jockey-club siégeaient à deux pas de l'Opéra Lepelletier dont la sortie donnait face la cour de l'hôtel Aguado. (l’actuelle mairie du neuvième) Traversons la rue Drouot pour nous diriger sur le boulevard Montmartre. Un coup d’œil sur le trottoir d'en face à l'angle de la rue de Richelieu à ce qui fut l'hôtel Lecoulteux  à l'époque du directoire. Un glacier Napolitain, Garchi, avait fait de cet espace un lieu un lieu public à la mode, dont les terrasses des jardins changeaient de couleurs grâce à un savant jeu de verres teintés. Un sieur Perrin loua Frascati pour y transporter la salle de jeu de l'hôtel d'Augny après le rachat par le financier Alexandre Aguado qui en fit sa résidence principale.. Les jardins de Frascati conduisaient de le rue de Richelieu à la rue Vivienne, la nuit, de nombreux feux d'artifice y étaient tirés. Si nous levons la tête aujourd'hui, nous apercevons tout en haut de l'immeuble, juste sous les toits, les fenêtres d'un appartement qui était occupé par un homme qui se cachait de ses créanciers et que son tailleur (le tailleur Buisson) lui louait,...enfin lui cédait car le locataire avait trouvé un moyen de paiement original pour l'époque : la Réclame ! C'est ainsi qu'en toute bonne conscience Balzac réglait les notes de son tailleur en monnaie de singe, mais qui passa à la postérité grâce aux romans de Balzac. Boulevard Montmartre numéros pairs la première maison d'angle était le bureau des Petites Affiches puis du journal Le Gaulois d'Arthur Meyer, fondateur du Musée Grévin à 50 mètres de là.

……

Mais avant, arrêtons nous devant le 16 boulevard Montmartre, hôtel construit en 1756 pour être la résidence de l'ambassadeur d'Autriche Mercy d'Argenteau qui y reçu Marie-Antoinette. Le comte Mercy fut aussi l'intermédiaire entre Fersen et la Reine. Certains auteurs signalent que c'est Mercy, qui fournissait l'encre sympathique achetée chez un apothicaire de la rue Saint Honoré (la pharmacie existe encore aujourd'hui près de la fontaine du Trahoir à l'angle de la rue de l'arbre Sec)  Plus tard, la Levasseur épousa de Mercy d’Argenteau, c"était rivale de la Saint-Huberty . Au premier étage, au début du XIX° «  Le Grand Cercle » puis, « Le Cercle des Ganaches », c’était une  salle de jeux pour militaires en retraite ou vieux barbons disait-on et rentiers d'un certain age. L'héroïne de Zola : "Nana", une nuit, en sortant du théâtre des Variétés aperçut les salons du Grand Cercle très éclairés. C'est du balcon du premier étage de l'hôtel Mercy d'Argenteau que fut tiré un feu d'artifice par Ruggieri, le jour de la première de Guillaume Tell à l'Opéra Lepelletier en août 1829. Pour éviter que la "populace" n'encombrat le boulevard, la police avait barré l'accès des deux côtés du boulevard Montmartre, la rue Vivienne n'étant pas encore percée. Pour donner le signal on n’attendait plus que Rossini qui  habitait le 10 du boulevard à l'emplacement du passage Jouffroy..

Un petit homme rondouillard, devant le cordon de police qui barrait le boulevard des Italiens trépignait en levant les bras au ciel :-"yé souis yakomo Lossini" disait-il aux policiers qui lui répondirent « "et moi, je suis le Pape peut-être" »

A SUIVRE…..

23/02/2009

L'attentat de la rue Bréda : Louise Colet et Alphonse Karr

Par Bernard Vassor

potins grivois breda hauteur.jpg
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La biographie de Louise Collet (1810-1876) est remplie d'histoires qui démontrent un caractère ombrageux, et une certaine propension à régler ses affaires de façon peu orthodoxes. La poétesse, qui tenait un salon littéraire 2 rue Bréda* en 1840, était enceinte. Son mari Hyppolite Colet,refusait toute idée de paternité pour des raisons qu'il était le seul à connaître. Son amant de l'époque, Victor Cousin, refusait tout aussi catégoriquement une quelconque reconnaissance. Alphonse Karr, au cours d'une soirée chez Louise, fit une allusion aux amours de la maîtresse de maison avec le philosophe auteur "Du Vrai, du Beau, du Bien". Louise Colet, prise d'un accès de rage, prit un couteau, et le planta dans le dos de l'infortuné auteur du "Voyage autour de ma Chambre". La blessure fut sans gravité, mais Alphonse Karr, conserva l'arme du crime qu'il exposât sur un mur de sasa chambre du 46 rue Vivienne, avec une étiquette portant l'inscription : "Donné par Louise Colet....dans le dos !"
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Elle fut ensuite l'amante de Musset, de Vigny de Flaubert. Ce dernier décida un jour de rompre avec la poètesse devenue romancière. Il lui adressa la lettre suivante :
"Paris, mardi matin 6 mars 1855
Madame,
J'ai appris que vous vous étiez donné la peine de venir, hier, dans la soirée, trois fois chez moi. je n'y étais pas. Et, dans la crainte des avanies qu'une telle persistance de votre part pourrait vous attirer de la mienne, le savoir-vivre m'engage à vous prévenir que je n'y serai jamais. J'ai l'honneur de vous saluer
Gustave Flaubert, Correspondance.
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Louise se vengea aussitôt en écrivant un roman publié dans "Le Moniteur: "Une histoire de soldat"où Flaubert est décrit sous les traits de Léonce :
"Sa face rouge était bouffie, comme s'il avait trop bu, et son corps rebondissait dans son gilet blanc: il n'avait plus ses beaux yeux brillants, mais des yeux épais et sans clarté".
Eugène de Mirecourt dans une biographie ou plutôt une hagiographie, raconta l'histoire suivante : "Elle rencontre un jour, dans la rue Montlmartre, un sien parent littérateur avec qui elle était brouillée depuis six mois. Ce monsieur, fort impoli, du reste la reconnaît à merveille et passe sans la saluer.
Voila notre muse hors d'elle-même. Quittant aussitôt le bras d'une personne qui l'accompagne, elle va droit à l'insolent et lui administre le moins féminin des soufflets".
Nous ignorons si ce monsieur insolent était Flaubert ?
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Jules Claretie qui ne l"a connue que vieille, ne se souvient "que d'une beauté un peu grasse" il ajoute que Victor Hugo lui avait dit un jour :
"J'ai cru longtemps que ce nom Gustave Flaubert n'était qu'un pseudonyme de Mme Louise Colet. Pendant les premières années de mon exil, je n'écrivais jamais à madame Colet, que sous couvert de monsieur Gustave Flaubert. Je me figurais que ce Gustave Flaubert n'existait pas, et en traçant ce nom sur l'enveloppe, c'est à Louise Colet que je pensais. A ce point que j'envoyais les phrases les plus tendres. Ce ne fut que lors de l'apparition de Madame Bovary que j'ai appris qu'ilm y avait au monde un M.Gustave Flaubert"
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*Aujourd'hui rue Henry Monnier, la maison faisait l'angle de la rue Neuve-Saint-Grorges ( Nottre-Dame-de-Lorette) et de la rue Neuve-Bréda (Clauzel) 
Le salon de Louise était fréquenté par Jules Janin, Delacroix, Lacroix, dit le bibliophile Jacob, Béranger qui l'avait surnommée la muse patriotique,les .sculpteurs Préault et Pradier, Vigny, Adolphe Dumas et Antony Deschamps. 

21/02/2009

Harriet Beecher Stowe

par Bernard Vassor

Case de l'Oncle larg.jpg
Une petite femme qui a commencé une grande guerre
Abraham Lincoln
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C'est en 1851 qu'Harriet présenta un texte qui fur publié en feuilleton dans un journal anti-esclavagiste de Washington. Ce texte n'eut aucun HARRIETT Beecher Stowe cadre.jpgimpact, en dehors de la clientèle habituelle de cette feuille confidentielle. Un éditeur en assura l'édition en deux volumes, sans trop y croire. case de l'oncle TOM néga hauteur.jpgLe livre connut un succès immédiat, "La Case de l'Oncle Tom" est vendu à plusieurs milliers d'exemplaires dès le premier jour à Boston. La contagion gagna tout le pays. Vendu à plusieurs millions d'exemplaires dans tout le pays et traduit dans vingt langues, cet ouvrage contribua grandement à la diffusion des thèses abolitionnistes. Des spectacles de théâtre utilisant des scènes tirées d'épisodes du roman furent jouées dans plusieurs états de l'Union. En 1862, elle fut reçue à la Maison Blanche par le président Lincoln. Elle entreprit un tournée en Europe dès 1856 pour populariser ses idées. Elle avait publié cette année là un essai où elle revendiquait l'égalité des sexes :"Dred, a Tale of the Dismal Swamp". De passage à Paris, elle résida 17 rue de Clichy en 1866. En 1870, Elle fit de nouveau scandale en prenant la défense de Lady Byron, révélant les relations incestueuses de son poète de mari avec sa soeur.
Harriet mourut en 1896 à l'age de 85 ans.

08/02/2009

Le théâtre "érotique" de la rue de la Santé. Deuxième partie

Par Bernard Vassor

L'Erotika Theatron

Théâtre des marionnettes amoureuses

Félicien Rops Erotika theatron hauteur.jpg
Eau-forte de Félicien Rops. 
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"Une sorte de village de province, enclavée au fond des Batignolles, entre les fortifications et les premières maisons de Clichy-la-Garenne"
C'est donc dans la rue que nous avons décrite dans l'article précédent, au numéro 54, que quatre amis intimes Amédée Rolland, Jean du Boys, Edmont Wittersheinck et son frère Camille surnommé 4025 (certainement en raison de la difficulté de prononcer son nom) firent construire une verrière, dans laquelle ils décidèrent d'installer un théâtre de marionnettes après un déjeuner où Lemercier de Neuville proposa d'appliquer l'idée de Duranty de créer un théâtre libre, où la fantaisie et toute license serait donnée dans un spectacle sans interdit.
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C'est le 27 mai 1862 qu'un public très particulier était invité à l'inauguration solennelle de l'Eroticon Theatron, nom qui était emprunté au très sulfureux ouvrage de Mirabeau : Erotika Biblion.
Au dessus de la porte était écrit :
Sans ordre, on arrive à Rien.
Au dessus de la porte des toilette, on pouvait lire :
Parlez à Ponson.
Ce qui fait que les convives disaient : "je vais à Ponson"
Le personnel domestique de la maison se composait de deux femmes, Trinquette et Titine,une ancienne demoiselle légère qui avait fait les beaux jours du Rat Mort. La cuisinière s'appelait Aimée, et couchait avec Trinquette, dans un petit appentis, à l'entrée du jardin, où était inscrit :
Parlez à Trinquette.
Amédée Rolland et Jean du Boys hauteur.jpg
Amédée Rolland et Jean du Boys, dessin de Carjat.
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C'est dans cette pièce minuscule qu'ils installèrent un piano qui était tenu en général par Georges Bizet. Les invités des dîners étaient Lemercier de Neuville, Henry Monnier, Théodore de Banville, Alcide Dussolier, Alexandre Pothey (que nous avons déjà rencontré dans l'article "Privat s'embête")Jules NoriacCoco Mal Perché l'éditeur des "Fleurs du Mal", Duranty le marionnettiste écrivain, William Busnach, Champfleury, et quelques acteurs. Sur le mur du fond, une fresque peinte par Lemercier, représentant une salle de spectacle avec des spectateurs, fort ressemblants qui se prélassaient dans des loges. Les decors comportaient seize plans de profondeur qui étaient "machinées" de manière très compliquée. Les poupées étaient en bois sculpté, et les costumes réalisés par les maîtresses des membres de l'administration de cette association. Des lettres d'invitation avaient été imprimées et envoyées aux personnes dignes d'entrer
(La salle pouvait contenir 21 personnes, sans compter les manipulateurs de marionnettes et les récitants dissimulés derrière la toile servant de castellet où étaient épinglés les textes.)
Affiche rue santé hauteur.jpg
Sur l'affiche ci-dessus, Henry Monnier, donnaite libre cours à sa fantaisie débridée dans une pièce que l'on peut qualifier sans hésiter de pornographique :
"La Grisette et l'Etudiant". Une sorte de Scènes de la vie de Bohème pour adultes avertis.....
Castelet guillotine.jpg
Lemercier de Neuville, avait écrit et réalisé cette pièce :"Les Derniers jours d'un condamné", spectacle "grand-guignolesque", trente cinq ans avant l'ouverture Cité Chaptal par Oscar Méténier d'un spectacle macabre de ce genre.
Le théâtre ferma ses porte en 1863, et la rue de la Santé prit le nom l'année suivante de rue de Saussure

07/02/2009

Le théâtre "érotique" de la rue de la Santé.

Par Bernard Vassor

Première partie : La rue de la Santé

Plan Batignolles rue Santé largeur.jpg
Cette rue, dans le village des Batignolles, fut percée en même temps que fut édifiée la construction du mur de l'enceinte fortifiée de Thiers (1841-1845). A cette époque dit Émile de Labédollière : "Les Batignolles ne se composaient que de quelques maisons éparses, de quelques fermes isolées, qui ne comptaient guère que le nombre d'habitants nécéssaire à leur fonctionnement. Quelques spéculateurs, alléchés par le bon marché des terrains, y construisirent des maisons de campagne qu'ils avaient l'intention de vendre avec bénéfice." 
En 1853, on construisit la ligne de chemin de fer dite :"Petite ceinture".
En 1860, les communes de Neuilly, Clichy intra-muros et des Batignolles, furent anexées à Paris pour des raisons fiscales.
La rue de la Santé que l'on voit sur le plan, se trouve près de la porte d'Asnières. Elle commençait à l'origine rue des Dames, et avait pour limite la rue Salnave, pour être ensuite prolongée jusquà la voie ferrée en 1854, elle longeait (à sa droite sur le plan) les ateliers et entrepôts des chemins de fer de l'Ouest (où le père Tanguy fut ouvrier à son arrivée à Paris).
Plan rue de la Santé 02 largeur.jpg
Plan de Desbuissons 1860.
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RENTIERS DES BATIGNOLLES 1860.jpg
Quelques rentiers des Batignolles en 1860.
La rue de la Santé changea de nom en 1864, après la fermeture du théâtre dont nous allons évoquer l'histoire dans l'article suivant.

23/01/2009

Un nom devenu un double anthroponyme, désigant à la fois un genre et un lieu : Le Grand Guignol. Oscar Méténier, la bohème à Montmartre, deuxième partie

Par Bernard Vassor

Un Théâtre comique d'épouvante !

Grand Guignol meutrière de 19 ans.jpg
Méténier est un petit homme
Actif, ardent et convaincu,
Frétillant et pétillant comme
S'il avait le feu au cul
Aristide Bruand
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Suite de la notice du 12 juin 2006 :
C'est dans une impasse de la rue Chaptal au 20 bis, que Oscar Méténier achèta un théâtre ( le Théâtre-Salon ) en 1896 pour y faire jouer ses pièces Grand guignol hauteur.jpgqui étaient refusées sur d'autres scènes. Compagnon de débauche de son ami Raitif de la Bretonne, il fréquentait aussi Edmond de Goncourt qu'il nourissait de ses anecdotes plus ou moins authentique, que Goncourt notaient complaisament dans son journal. Oscar Méténier, comme son père, avait été "chien de commissaire", c'est à dire secrétaire général d'un commissariat de quartier (secrétaire du commissariat de la Roquette). Cette fonction lui fut très utile par la suite pour assurer l'impunité pour des amis dans l'embarras, quand d'aventure, ils se trouvaient en fâcheuse position dans des lieux de débauche et de vice dont Méténier et ses amis étaient les clients assidus, des bars louches, des maisons borgnes, et des lupanars homosexuels. Il était né 1859, il est mort à Saint-Mandé en 1918.
Elève dans un collège de jésuites à Bourges,Méténier s'engagea dans l'armée à l'âge de 18 ans.
Ensuite, son père le fit entrer dans des commissariats de police, dans le onzième arrondissement, aux Batignolles, puis à Montmartre. Ce qui lui donna l'occasion de cotoyer les endroits chauds de la capitale.
Chien de commissaire ! Sa fonction de secrétaire d'un poste de police, consistait à assister le commissaire dans toutes ses fonctions, des saisies immobilières, de constat de crimes, et de la présence officielle des autorités aux exécutions capitales, qui lui donneront par la suite matière à spectacle....grand-guignolesque, de têtes coupées, de crimes atroces et sanguinolents. Inspiré par ses amis, Lorrain, Bruant, et Maupassant qui fut un précurseur en organisant chez lui à La Guillete, une farce inspirée par un crime commis à Montmartre. Il avait invité deux cents personnes une nuit, pressées dans l'allée de sa maison devant une gigantesque toile représentant une femme nue, pendue par les pieds. Sortant de l'obscurité jaillit un faux sergent de ville s'arrêtant, et observant le cadavre. De vrais cheveux avaient été collés sur la toile, le policier la palpe, la saisit par les nattes, et sortant un stylet, il lui ouvrit le ventre, devant les dames horrifiées, du sang de lapin gicle de la plaie.....
Grand-Guignol était né !
Fin de la deuxième partie

14/01/2009

Le livre polisson d'un policier pervers, chef de la sûreté

Par Bernard Vassor

Goron amour à Paris hauteur.jpg
Ce livre, digne de figurer dans une anthologie d'ouvrages érotiques est une collection d'histoires authentiques, racontées par un ancien chef de la Sûreté Marie-François Goron, à la fin du XIX°siècle.
"L'Amour à Paris, Paris, Jules Rouff & Cie, (sans date)1900.
L'Amour criminel et les Industries de l'Amour, divisé en deux volumes :
1.... Les Parias de l'Amour
2. Le Marché aux femmes.
Illustré de nombreuses figures de J. Wely, cet ouvrage décrit avec complaisance les bas-fonds de la société : "Le monde infâme des pierreuses et des souteneurs" puis  "Le souteneur et le voyou tueur de filles" et "Le bourgeois assassin" et toute une galerie de personnages le plus souvent répugnants.
......
Les services de la Sûreté se trouvaient dans un appartement sombre et insalubre du quai de l'Horloge. C'est Goron qui inaugura les bureaux du quai des Orfèvres.
 
Après avoir quitté ses fonctions, le chef de la Sûreté Maie-François Goron ouvrit une agence de détective privé et se lança dans une carrière littéraire où il écrivit (avec des porte-plumes) une série d'ouvrages d'études policière.

20/12/2008

Le Théâtre de Polichinelle aux Champs-Elysées

Par Bernard Vassor

Polichinelle Nodier.jpg
Charles Nodier, et le directeur du théâtre de Polichinelle.
...........

"Pan ! qu’est-ce qu’est là ?
C’est Polichinelle que v’là !
À vous faire rire,
Mes enfants, il aspire,
Jeunes et vieux,
Ceux qui rient sont heureux »

......

Nous sommes en 1845, c'est aux Champs-Elysées qu'ont migré les petits théâtres du boulevard du Temple. On y jouedes pantomimes militaires, d'où les guerriers Français, sortent toujours vainqueurs, mademoiselle Élisa qui pèse deux cents kilos, des sirènes vivantes venues tout droit des mers du Nord, le Cirque de la famille Bouthor, la frêle et maladive jeune fille qui se fait rompre sur le ventre des gros pavés sur lesquels un athlète, assène de grands coups de massue.
La  petite baraque de planches abritant le castellet rouge du théâtre de marionnettes ne désemplissait jamais. Les spectateurs assistaient sans se lasser, plusieurs fois au même spectacle.
.......
Charles Nodier s'en était fait l'historien, et déclarait n'avoir pas réussi à en percer les secrets :

[....]""On appréciera, je l’espère, à sa valeur, mon grand travail sur Polichinelle (si je le conduis jamais à fin) par un seul fait qui est heureusement bien connu, et que je rapporte sans vain orgueil comme sans fausse modestie. Bayle adorait Polichinelle. Bayle passait les plus belles heures de sa laborieuse vie, debout, devant la maison de Polichinelle, les yeux fixés par le plaisir sur les yeux de Polichinelle, la bouche entr’ouverte par un doux bayle édition 1820.jpgsourire aux lazzi de Polichinelle, l’air badaud, et les mains dans ses poches, comme le reste des spectateurs de Polichinelle. C’était Pierre Bayle que vous connaissez, Bayle l’avocat-général des philosophes et le prince des critiques, Bayle qui a fait la biographie de tout le monde en quatre énormes in-folio ; et Pierre Baylen’a pas osé faire la biographie de Polichinelle ! *Je ne cherche pas toutefois dans ce rapprochement des motifs de m’enorgueillir comme un sot écrivain amoureux de ses ouvrages. La civilisation marchait, mais elle n’était pas arrivée. C’est la faute de la civilisation, ce n’est pas la faute de Bayle. Il fallait à Polichinelle un siècle digne de lui. Si ce n’est pas celui-ci, j’y renonce" [...]

Voici sa conclusion qui ne manque pas de modestie :

"J’ai promis cependant l’histoire de Polichinelle. Eh, mon Dieu ! je la ferai un jour, et je ne ferai plus que cela : car c’est décidément le seul livre qui reste à faire ; et si je ne la faisais pas, je vous conseille en ami de la demander à deux hommes qui la savent mieux que moi, - Cruyshank et Charlet".

*En effet, il n'y a pas de notice à son nom dans le dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle (1647-1706)

Charles Nodier, bibliotécaire à "L'Arsenal", était aux premiers rangs pour disposer des ouvrages relatant les aventures de Polichinelle**, né en Italie, ayant voyagé dans toute l'Europe, Pulcinello, devenu Punchinello en Angleterre, abrégé en Punch, ce personnage bossu par devant et par derrière, libertin, hableur, mais faisant beaucoup plus de bruit que de mal. Les critiques anglais, le comparaient à Don Juan !

Le plus ancien livre, très rare, datant de 1547, intitulé :"La Tragédie Policienelle" par don Cajetano-Alberto de la Barrera, n'est connu dans le monde qu'à quatre exemplaires, dont un est à....l'Arsenal.

On rencontrait déjà Polichinelle sur des théâtre de marionnettes au temps d'Henri IV selon l'académicien Charles Magnin employé à la Bibliothèque Royale

28/11/2008

Histoire anecdotique : M.Gaudy, le bonnetier, "hermaphrodite" de la rue du faubourg Saint-Denis

 

Par Bernard Vassor

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Dans un petit ouvrage anonyme (in-32) attribué à Balzac*, publié en 1826, nous trouvons la description curieuse d'une enseigne peinte affichée au mur d'une échope du numéro 8 de la rue du faubourg- Saint-Denis.

L'auteur de ce livre en fait le commentaire suivant :

"LA MERE DE FAMILLE (A la)

Gaudy, bonnetier,rue du faubourg Saint-Denis, n° 8.

Par ma foi, c'est la première enseigne peinte de la Mère de famille qui ait un tableau. Madame Debière rue du Helder, boulevard des Italiens, s'est également placée sous le signe de la Mère de famille; mais elle n'a pas cru devoir nous donner le portrait de cette bonne mère; Monsieur Gaudy a cru devoir le faire; mais comment monsieur Gaudy se dit-il la mère de famille ? Il est donc marié ou hermaphrodite".

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Douze ans plus tard, ironie de l'histoire, ce monsieur Gaudy (J.L.) va croiser une nouvelle fois le chemin de l'auteur de la Comédie Humaine.

La baronne de Pilloy*qui était en relation avec l'ancien bonnetier, avait proposé à Balzac de faire acheter (pour 4000 francs) un livre qui serait signé par ce propriétaire de la Mère de Famille, dans le but d'obtenir de Louis-Philippe, l'attribution de la légion d'honneur.

Honoré, avait l'habitude d'inscrire dans son livre de cuisine qui ne quittait pas son bureau, toutes les pensées de Napoléon. Il y en avait cinq cents quand cette proposition lui fut faite.

Nous apprenons ainsi, dans une lettre adressée à celle qui allait devenir sa femme***, il entreprit de faire un recueil qu'il intitula Maximes et pensées de Napoléon. Ce livre fut précédé d'une épitre dédicatoire signée J-L. Gaudy jeune. 

*Petit dictionnaire critique et anecdotique des enseignes de Paris, par un batteur de pavé.- [M. Brismontier].- Chez les marchands de nouveautés, 1826

Imprimerie H.Balzac, rue des Marais Saint-Germain, n° 17

**La baronne habitait à cette date 6 rue Saint-Georges, où, quatre ans plus tôt naissait Degas. La lettre était adressée à sa soeur Laure Surville : 28 du fbg Poissonnière, maison de Racine (?), pour remettre à M.de Balzac.

***(...)J'ai vendu ce travail à un ancien bonnetier qui est un gros bonnet de son arrondissement,qui veut avoir la légion d'honneur, et qui l'aura en dédiant ce livre à Louis Philippe (...):. Lettres à l'Etrangère, 10 octobre 1838.

25/10/2008

Une pièce libidineuse de Maupassant publiée 52 ans après sa mort. A la feuille de rose. "Comédie de moeurs (mauvaises) en un acte en prose, représentée à Paris pour la première fois en 1875" Maison turque

PAR BERNARD VASSOR

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Frontispice "à système", procédé déjà utilisé par Mérimée pour dévoiler progressivement son portrait en "comtesse Clara Gazul"
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Le texte de la pièce est accessible à l'adresse suivante :     http://www.maupassantiana.fr/Oeuvre/ThAlafeuillederose.html
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C'est avec son ami d'enfance Robert Pinchon (surnommé la Toque)  que Maupassant écrivit cette pochade. La pièce fut jouée à deux reprises : en 1875, et en 1877. Maupassant habitait alors 2 rue Moncey, une petite chambre au rez-de-chaussée donnant sur cour. 
Tous les rôles masculins ou féminins étaient tenus par : Maupassant lui-même, Octave Mirbeau, Robert Pinchon, Léon Fontaine, rien que des hommes. Le public était composé de Flaubert (à qui la pièce était dédiée qui riait à se tordre, avait trouvé la pièce "rafraîchissanté" ) Goncourt Edmond (quila  qualifia de salauderie ) Emile Zola, Paul Alexis, Léon Hennique, Henri Céard (le tout Médan !) Antoine Guillemet, et Maurice Leloir qui avait mis son atelier du quai Voltaire à la disposition de ses amis. Le texte avait été distribué sur un papier à en-tête du ministère de la marine où Maupassant était employé. On voit que ses journées au ministère étaient bien remplies.
.La deuxième représentation eut lieu en 1877 dans l'atelier du peintre Georges Becker, 26 rue de Fleurus. La princesse Mathilde était venue y assister, la seconde femme était Suzanne Lagier pourtant réputée très peu farouche, et même franchement obscène en privé, avait quitté la représentation "avec éclat" en simulant l'indignation. Certains prétendent que cette pièce fut jouée chaque année du vivant de Maupassant, mais aucun témoignage ne vient confirmer cette supposition de Georges Normandy, un des premiers biographes de l'auteur de Boule de suif.
Pour  toutes les actualités sur Maupassant, consulter le site Maupassantiana de Noëlle Benhamou. Vous pouvez même vous abonner à sa lettre mensuelle.

08/08/2008

LES TABLEAUX DE LA VENTE APRES DECES DE GUY DE MAUPASSANT

Par Bernard Vassor

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Rene billotte
Dans le dernier numéro de la revue Maupassantiana, j'ai trouvé le catalogue de la vente après décès de Maupassant.
Curieusement, des artistes figurant sur cette liste sont cités dans Bel-Ami , figurant dans l'appartement boulevard Malesherbes de la femme du directeur de Georges Duroy à "La Vie Française" Madame Walter !
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Voici la liste, avec  une petite note. Les noms soulignés figurent dans le roman.

Bellangé Hyppolite, élève de Gros

Billotte René 1846-1915

Gervex Henry 1852-1929 du groupe de la Nouvelle-Athènes, portraituré (caricaturé) par Zola dans « L’œuvre »

Guillemet Antoine, 1842-1913, voisin de Maupassant rue Clauzel. Documenta Zola dans ses « dossiers préparatoires pour L’œuvre »

Harpignie Henri Joseph 1819-1916. Peintre de l’Ecole de Barbizon, précurseur de l’impressionnisme, expose au salon des refusés de 1863.

Jeanniot Pierre Georges 1848-1934, ami de Manet Forain Degas. Il illustra « Les contes choisis de Maupassant » (et Germinie Lacerteux)

Leloir Maurice  1851-1940, peintre de costumes anciens il a illustré « Une Vie » de Maupassant

Frascati L.B……… ?

Le Poitevin Louis, cousin de Maupassant (atelier rue Montchanin)

Nozal Alexandre 1852-1929 : Au temps de Maupassant, catalogue d'exposition, Château-Musée de Dieppe, 19 juin - 31 oct. 1993, Musée de Dieppe, 1993
 Riou Edouard ? 1833-1900 élève de Daubigny peintre illustrateur.

Raffaëlli Jean-François 1850-1924, lié aux impressionnistes, peintre naturaliste, estimé par Zola, Goncourt  et Maupassant

Michel ????

Olivier Léon ???

Bosc Jeanne artiste statuaire, épousa Jean-Louis Forain en 1891.

07/08/2008

SUR LA MORT DE GERARD DE NERVAL,

PAR BERNARD VASSOR

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Ce dernier portrait,fin 1854, début 1855, peu avant sa mort par Félix Nadar, ou Adrien Tournachon son frère,113 rue Saint-Lazare.
Après de nombreuses versions déjà publiées sur ce blog, voici celle d'Alexandre Dumas, qu'il semble avoir écrite en 1866, 11 ans après le "suicide" de la rue de la Vieille Lanterne. Cette version bien sûr, contredit les documents officiels (procès-verbal du commissariat de police Saint-Merri) dont nous avons lecture dans une note précédente. Notre ami Alexandre, conteur impénitent, a mis sa patte à cette nouvelle histoire.
C'est dans un texte intitulé Nouveaux Mémoires, Sur Gérard de Nerval, Edtions Complexe, 1990.
Dans ces Mémoires "inédits", Dumas raconte que le vendredi matin 26 janvier, il fut réveillé par une note d'Arsène Houssaye lui annonçant la mort de Gérard dans un accès de folie, et lui demandant de venir le rejoindre rue de la Vieille Lanterne.Ce que fit Alexandre en toute hâte. Arrivé sur place, il décrit les lieux :
"Alors la rue se rétrécit. On lit en grosses lettres sur un mur en face :
BAINS DE GESVRES
et au dessous :
BONDET (sic)
entrepreneur de serrurerie.
Au pied du mur sur lequel sont inscrites ces deux affiches, commence un escalier avec une rampe de fer.
Escalier visqueux ,étroit, sinistre, un prolongement de la rue conduit à la boutique d'un serrurier qui a pour enseigne une grosse clé peinte en jaune.(...)dans l'obscurité au fond, vous découvrez une fenêtre cintrée avec des barreaux de fer pareils à ceux qui grillent les fenêtres des prisons. Vous y êtes, c'est à ce croisillon de fer que le lacet était attaché. Un lacet blanc comme ceux dont on fait des cordons de tablier. (...)C'est là, les pieds distants de cette marche de deux pouces à peine que le vendredi 26 janvier 1855 au matin, à sept heures trois minutes, ( notez la précision !) juste au moment où se lève cette aube glaciale des nuits d'hiver que l'on a trouvé le corps de Gérard encore chaud et ayant son chapeau sur la tête.(...)Les gens qui les premiers le virent, n'osèrent pas le détacher, quoique l'un d'eux fit observer qu'il n"était pas mort puisqu'il bougeait encore la main (...) On alla chercher le commissaire de police, M. Blanchet, et un médecin dont j'ignore le nom. Le corps était encore chaud. Le médecin pratiqua une saignée, le sang vint; mais Gérard ne rouvrit pas les yeux. Nous allâmes de la rue de la Vieille Lanterne à la morgue où le corps avit été déposé. De l'endroit où Gérard s'était pendu, jusqu'à la morgue, il n'y avait qu'un pas.
Le récit se poursuit avec la description du cadavre de Nerval, vêtu seulement d'un pantalon, le torse nu, puis les démêlés sordides dans ces circonstances avec Gautier et Houssaye à propos des funérailles, et de l"élévation d'une stèle sur sa tombe.
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Cette estampe de son ami Célestin Nanteuil fut publiée dans "L'Artiste" avec la légende suivante :
"N'est-il pas étrange de penser que Gerard de Nerval, qui a marqué de l'empreinte de son pied hardi, au haut des cascades de Tivoli, des glaciers du Saint-Gothard et des dangers du Vésuve soit venu se briser à ce sombre écueil"
La ruelle sera démolie peu de temps après la mort de Gérard.
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LA MORGUE DU MARCHE-NEUF
C'est Asselineau qui fut prévenu de la mort de Gérard par la Morgue ou la police. Un fragment de carte de visite avait été retrouvé dans la poche de Nerval.
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ARCHIVES DE LA PREFECTURE DE POLICE
REGISTRE DE LA MORGUE :
"Arrivée du corps à 9 heures et demie du matin de Labrunie Gérard dit Nerval, demeurant 13 rue des Bons-Enfants; vêtements et objets :
un habit noir, deux chemises en calicot, deux gilets de flanelle, un pantalon en drap gris vert, des souliers vernis, des chaussettes en coton roux, des guêtres de drap gris, un col noir en soie, un chapeau noir, un mouchoir blanc.
Genre de mort : suspension (..) suicide; cause inconnue (..) cadavre trouvé sur la voie publique rue de la Vieille-Lanterne (..) cet homme était connu avant son entrée à la Morgue (..) le corps a été réclamé par la Société des Gens de Lettres(...)."
Procès-verbal du commissariat de police de Saint-Merri :
"Ce matin, à sept heures et demie (26 janvier 1855) le dénommé a été trouvé pendu aux barreaux de la boutique d'un serrurier (Boudet) rue de la Vieille Lanterne, déclaration de Laurent, sergent de ville du quatrième arrondissement; l'individu était déjà mort, transporté au poste de l'Hôtel de Ville, secouru par deux médecins, mais en vain. Il, s'est pendu avec un ruban de fil, son corps était attaché aux barreaux avec le lien, aucune trace de violence sur le cadavre"
Le 29 janvier 1855, le préfet de Police, donnait l'autorisation de remettre la dépouille de Gérard à Balard, délégué de la Société des Gens de Lettres.
Le même jour, le commissaire de Police donnait l'autorisation au sculpteur Auber, de mouler ou daguerréotyper les traits de Gerard de Nerval. D'après une lettre d'Auguste Luchet**, il semblerait que le masque et la photographie aient été réalisés un jour avant que l'autorisation ne lui fut accordée. Jusqu'à ce jour, nous n'avons aucune trace de ces éléments.... 
D'après les chroniqueurs de ce temps,la température cette nuit-là, était de moins dix-huit degrés. 
*Archives de la préfecture de Police
**Auguste Luchet, maçon, de la loge Saint Vincent de Paul, avait annoncé la mort de Gérard de Nerval à Godfroy, Louis Ulbach François Favre en ces termes : "M. Auber sculpteur distingué à tous les titres, a bien voulu se charger de reproduire les traits de notre malheureux frère...".C'est moi qui souligne ce passage. Tous ces noms cités sont ceux des futurs (en 1858) créateurs de la revue "Le Monde Maçonnique". Il semblerait donc que Gérard fut du nombre des frères de la loge 113 ???
BnF (Smith-Lesouëf. Res 3683 )

27/07/2008

VILLEMESSANT, PATRON DU "FIGARO", UN HOMME BIEN PEU RELUISANT

PAR BERNARD VASSOR

Le Figaro :

Une feuille «dévote et légitimiste à la première page;

folâtre, badine et cancanière dans les deux autres»

(Larousse du XIXe siècle).

Article uniquement à charge, garanti 100 pour 100 non vouiquipédié, où vous ne lirez pas que "Paris a été sous l'occupation des troupes prussiens en 1870" ???  Pour des informations plus objectives, et favorables de nombreuses biographies (et agiographies) ont été consacrées à ce personnage hors du commun.

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                                                                      "Sans liberté de blâmer etc.."
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Les journaux de son temps, et les archives de la préfecture de Police fourmillent d'histoires peu ragoûtantes concernant la vie du puissant patron du Figaro pendant près de quarante ans.
Il a lui-même dans de nombreuses publications donné dans des "Mémoires", les étapes de sa vie, légèrement romancées.
VOICI UNE LISTE DE JOURNAUX CREES PAR VILLESSANT :
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Un volume de son autobiographie qui en comporte six, après une parution en feuilleton dans le  journal "L'Evènement" dont il reprit le titre en 1865.
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Plusieurs publications récentes racontent l'histoire du Figaro, et de son patron. Nous ne donnons ici que les documents et articles négatifs relatifs à sa vie privée et professionnelle.  
Nous nous y perdons un peu dans l'histoire de son état-civil. Il est né à Rouen en 1810 selon les uns, et 1812 selon d'autres, sous le nom de Jean-Baptiste Cartier-Briard, ensuite nous le trouvons avec le patronyme Jean-Baptiste Cartier de Villemessant pour terminer par Hyppolyte-Auguste de Launay de Villemssant, ce qui fait plus chic.
Il porta le nom de son père, le colonel Cartier juqu'à l'age de 14 ans. Dans sa vingtième année, il habitait à Nantes  où il était inspecteur général des assurances. Il déménagea à Blois où il se fit marchand de rubans.
A l'age de vingt quatre ans, il vint à Paris et débuta dans le journalisme.
Un article d'annonces "Les Petites Affiches" signale en 1875 que Villemessant, demeurant à Paris avenue de l'Impératrice 64, a été déclaré deux fois en faillite (sans doute pour son commerce de rubans)
1) Par jugement du tribunal de commerce de Blois en date du 25 juin 1835, sous le nom de Cartier-Briard.
2) Par jugement du tribunal de commerce de la Seine en date du 27 mai 1844, sous le nom de Jean-Baptiste Cartier de Villemessant.(pour la faillite du journal "La Sylphide").
Un procès retentissant eut lieu seulement en 1875 avec des créanciers, la veuve Thomas et la dame Mauperin pour le recouvrement des sommes impayées.
Villessant fut condamné à payer aux plaignantes les sommes dues avec intérêt du jour du 22 février 1876, trente quatre ans après !
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Monsieur de Villemessant devant le tribunal correctionnel de Blois 
Un vilain procès à l'audience du 15 juillet 1836. "Une demoiselle A...,jeune couturière de Blois, aurait eu la faiblesse d'accorder un rendez-vous à monsieur Cartier dans une allée d'un jardin, lieu de promenade propice à ces sortes de rencontres. A peine arrivés à l'entrée de ces promenades, de vives interpellations auraient été faites à Mlle A... qui n'aurait pas jugé convenable d'y répondre. Alors M.Cartier lui appliqua une vigoureuse paire de soufflets, suivie de coups de cannes, de coups de poing, de coups de bottes, si bien que le corps de Mlle A..aurait été cruellement martyrisé et qu'il en serait résulté une incapacité de travail de plusieurs jours. Pour comble de honte, cette scène se serait produite devant les yeux de l'épouse de de M.Cartier et de sa domesticité que Mlle A..accuse de complicité."
L'audience, en l'absence de la plaignante souffrant d'un mal de pieds, fut reportée à huitaine.
Audience du 22 juillet 1836 :
2ee42f71e290a3cad83b86e12d8e70b1.jpg""La foule déborde le prétoire, envahit le barreau et met littéralement le tribunal en état de blocus rigoureux.
A l'appel de l'affaire par l'huissier mettant en cause les époux Cartier et Mlle Minier, leur domestique, un - Ahhhh ! prolongé part du sein de l'auditoire et indique que l'impatience longtemps contenue va être satisfaite.
"L'avocat de Mlle A...offre pour prouver ce qu'il avance, de lire la correspondance érotique du couple extra-conjugal. Le tribunal refuse de livrer à la publicité cette lecture peu convenable au grand désappointement du public " Toutefois, le juge autorise un extrait de cette correspondance de la part de Mlle A..., ce qui fit dire à une personne de l'assistance : que "Mlle A...est la nouvelle Héloïse de la couture.... "
De nombreux témoins de la scène, témoignèrent de la violence des coups exercée sur la plaignante. 
(Le Constitutionnel du Loir-et-Cher)
31ec287c5872e4196de1b681fad9ed63.jpgLe tribunal acquitta la fille Minier ( la domestique), et condamna les époux Cartier à seize francs d'amende, trois mois de prison 1200 francs de dommages-intérêts et aux frais du procès, et il fixa à deux ans la contrainte par corps.
D'autres procès émaillèrent la carrière de Villemessant, mais le pire fut sans nul doute une affaire dont il n'eut pas à répondre devant la justice.  Profitant de la faiblesse de sa mère, il avait détourné (pour payer des dettes de jeu dirent certains journaux) les économies de sa mère et de sa soeur, les laissant vivre dans l'indigence la plus complète dans un taudis de banlieue. Les deux femmes préférèrent le suicide le même jour par le charbon à la misère. Villemessant les fit enterrer "civilement" souligne le journal déjà cité plus haut. 
En 1871, il profita des difficultés financières de Dinaucho, "les restaurateur des lettres" où les gens de lettres et quelques artistes sans le sous trouvaient là le couvert à la table du restaurant de la rue de Navarin. Le brave Villemessant racheta à bas prix cet estaminet, (la cantine d'Henri Murger) pour le revendre avec un coquet bénéfice.
Il aurait créé vers 1850, une chasublerie rue de Tournon (Barbier Sainte-Marie, cahiers Goncourt 2000)
En 1876, il annonça la création d'une maison de retraite pour les journalistes, mais accusé de spéculation par Francisque Sarcey, il préféra renoncer.
Après la Commune de Paris, son journal fut le plus féroce dans l'appel à l'assassinat des proscrits. Rappelons aussi, la campagnes de presse contre les impressionnistes en 1874, comme en 1857, le journal s'était acharné contre le livre de poésie de Baudelaire.
Il fut condamné en 1872 à de la prison. Incarcéré à Sainte Pélagie, il se fit transférer à la Maison Municipale de Santé Dubois, 200 rue du faubourg Saint Denis. Cet hôpital, et le pavillon Gabielle de l'hôpital Saint Louis, sont les deux étanmissements désignés officielllement pour le séjpur des détenus malades, pouvant êtrer traités à leurs frais.  
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Ce rapport de police figurant dans le volumineux dossier "Villemessant" aux archives de la préfecture de Police me laisse perplexe...C'est un cadeau empoisonné qu'il fit à Lissagaray que cet abonnement gratuit et les félicitations du plus acharné pourfendeur de "la vile populace" que représentait le communard basque.

18/07/2008

YVETTE GUILBERT ET LES LITTERATEURS DE SON TEMPS, "DECADENTS ET NATURALISTES"

PAR BERNARD VASSOR

En direct de Granvillle à la Citrouille.

Yvette Guilbert (1865-1944) "La diseuse fin de siècle".

Dans une autobiographie publiée en 1927, "La chanson de ma vie" Yvette déclare : "mon goût allait vers des écrivains tels que Goncourt, Zola, Maupassant (...)je cherchais à exprimer en chansons ce qu'ils avaient réalisé par le roman". Tout au long de sa longue carrière de chanteuse, elle approcha donc , et eut l'occasion de se produire devant les représentants de l'Ecole naturaliste, et décadents. Des Hydropathes et "Chanoiresques", firent partie de ses amis. Zola dont nous avons déjà parlé, fut impressionné avec Daudet (Alphonse) et Goncourt eurent l'occasion de l'entendre chez l'éditeur Charpentier, et au cours d'auditions privées dans une salle de réception du journal "Le Figaro" rue Drouot. Octave Mirbeau, Catulle Mendès, Jean Richepin, Alphonse Allais, Auriol, Maurice Donnay, Émile Goudeau, Sarah Bernhardt, Henry Baüer, furent également dans le cercle de ses relations intimes. Son amitié avec Jean Lorrain qui lui écrivit des chansons dura, au milieu de quelques orages jusqu'à la fin de la vie de l'auteur de "La Maison Philibert".

A ses début dans la chanson, après un passage non concluant au théâtre des Variétés, elle interprêta des chansons d'un auteur dont elle avait découvert les oeuvres chez un bouquiniste des quais. C'était un recueil intitulé "Les Chansons sans gêne" de Léon Xanrof (recueil payé 12 sous). Le succès fut immédiat, "Le Fiacre" et "La complainte des 4 z'étudiants"fit un triomphe dans tous les cafés-concerts où elle se produisit.

Plus tard, elle acheta une maison à Médan, où je ne vous dis pas qui elle eut l'occasion de croiser dans les chemins, faisant de la bicyclette...Nous pouvons ajouter à la liste de ses familiers :Jules Roques, "La Duse"(Eléonore), Lucien Guitry, La Goulue (Louise Weber) et son amante la "Môme fromage", Pierre Loti, Reynaldo Hahn, Frantz Jourdain, Rachilde, Gérard d'Houville*,Maurice Boukay,  sans oublier Aristide Bruantbien sûr. Immortalisée par Toulouse-Lautrec et jules Chéret, le plus grand affichiste, Yvette Guilbert se produisit dans la plupart des grands cafés-concerts de la fin du dix neuvième.

Un journaliste conférencier Hugue Le Roux, vint la trouver pour lui proposer de se faire entendre en illustration de ses causeries au "Théâtre d'Application"de la rue Saint-Lazare dans qui faisait suite à la salle d'exposition de peintures. Tenue par un nommé Charles Bodinier, la salle fut naturellement appelée "La Bodinière". Ce théâtre avait été créé pour mettre à la disposition des débutants, ou des auteurs dramatiques venant là y faire des premières lectures de leurs pièces. Yvette Guilbert habitait à l'époque à deux pas, au 30 rue Saint-Lazare. C'est ainsi qu'elle rencontra bon nombre de jeunes auteurs.

Suite après le 4 septembre......