08/02/2009
Le théâtre "érotique" de la rue de la Santé. Deuxième partie
Par Bernard Vassor
L'Erotika Theatron
Théâtre des marionnettes amoureuses
Eau-forte de Félicien Rops.
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"Une sorte de village de province, enclavée au fond des Batignolles, entre les fortifications et les premières maisons de Clichy-la-Garenne"
C'est donc dans la rue que nous avons décrite dans l'article précédent, au numéro 54, que quatre amis intimes Amédée Rolland, Jean du Boys, Edmont Wittersheinck et son frère Camille surnommé 4025 (certainement en raison de la difficulté de prononcer son nom) firent construire une verrière, dans laquelle ils décidèrent d'installer un théâtre de marionnettes après un déjeuner où Lemercier de Neuville proposa d'appliquer l'idée de Duranty de créer un théâtre libre, où la fantaisie et toute license serait donnée dans un spectacle sans interdit.
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C'est le 27 mai 1862 qu'un public très particulier était invité à l'inauguration solennelle de l'Eroticon Theatron, nom qui était emprunté au très sulfureux ouvrage de Mirabeau : Erotika Biblion.
Au dessus de la porte était écrit :
Sans ordre, on arrive à Rien.
Au dessus de la porte des toilette, on pouvait lire :
Parlez à Ponson.
Ce qui fait que les convives disaient : "je vais à Ponson"
Le personnel domestique de la maison se composait de deux femmes, Trinquette et Titine,une ancienne demoiselle légère qui avait fait les beaux jours du Rat Mort. La cuisinière s'appelait Aimée, et couchait avec Trinquette, dans un petit appentis, à l'entrée du jardin, où était inscrit :
Parlez à Trinquette.
Amédée Rolland et Jean du Boys, dessin de Carjat.
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C'est dans cette pièce minuscule qu'ils installèrent un piano qui était tenu en général par Georges Bizet. Les invités des dîners étaient Lemercier de Neuville, Henry Monnier, Théodore de Banville, Alcide Dussolier, Alexandre Pothey (que nous avons déjà rencontré dans l'article "Privat s'embête")Jules Noriac, Coco Mal Perché l'éditeur des "Fleurs du Mal", Duranty le marionnettiste écrivain, William Busnach, Champfleury, et quelques acteurs. Sur le mur du fond, une fresque peinte par Lemercier, représentant une salle de spectacle avec des spectateurs, fort ressemblants qui se prélassaient dans des loges. Les decors comportaient seize plans de profondeur qui étaient "machinées" de manière très compliquée. Les poupées étaient en bois sculpté, et les costumes réalisés par les maîtresses des membres de l'administration de cette association. Des lettres d'invitation avaient été imprimées et envoyées aux personnes dignes d'entrer.
(La salle pouvait contenir 21 personnes, sans compter les manipulateurs de marionnettes et les récitants dissimulés derrière la toile servant de castellet où étaient épinglés les textes.)
Sur l'affiche ci-dessus, Henry Monnier, donnaite libre cours à sa fantaisie débridée dans une pièce que l'on peut qualifier sans hésiter de pornographique :
"La Grisette et l'Etudiant". Une sorte de Scènes de la vie de Bohème pour adultes avertis.....
Lemercier de Neuville, avait écrit et réalisé cette pièce :"Les Derniers jours d'un condamné", spectacle "grand-guignolesque", trente cinq ans avant l'ouverture Cité Chaptal par Oscar Méténier d'un spectacle macabre de ce genre.
Le théâtre ferma ses porte en 1863, et la rue de la Santé prit le nom l'année suivante de rue de Saussure.
15:57 Publié dans HISTORICO-LITTERAIRE | Tags : georges bizet, lemercier de neuville, henry monnier, théodore de banville, alcide dussolier, alexandre pothey, william busnach | Lien permanent | Commentaires (0) | | | | Digg