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14/01/2011
Gérard de Nerval, amoureux de Montmartre, pour le meilleur et pour le pire.
Par Bernard Vassor

La rue Bénédicte (avenue Gabrielle) que nous apercevons à gauche dans la photographie ci-dessous, la maison abritait le fameux cabaret "L'Echelle de Jacob"". Nous pouvons apercevoir au sommet de la Butte, la maison du docteur Blanche.
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"J'ai longtemps habité Montmartre, on y jouit d'un air très pur, de perspectives variées, et on y découvre des horizons magnifiques "soit qu'ayant été vertueux l'on aime à voir lever l'aurore, qui est très belle du côté de Paris, soit qu'avec des goûts moins simples on préfère ces teintes pourprées du couchant, où les nuages déchiquetés et flottants peignent des tableaux de bataille et de transfiguration au dessous du grand cimetière, entre l'arc de l'Etoile et les coteaux bleuâtres qui vont d'Argenteuil à Pontoise."
Gérard déplore ensuite les transformations qui commencent à défigurer sa terre d'élection :
" Les maisons nouvelles s'avancent toujours, comme la mer diluvienne qui a baigné les flancs de l'antique montagne, gagnant peu à peu les retraites où s'étaient réfugiés les monstres informas reconstruits depuis Cuvier. Attaqués d'un côté par la rue de l'Empereur (Lepic), de l'autre par la mairie, qui sape les âpres monstres et abaisse la hauteur du versant de Paris, (...) Cependant il nous reste encore un certain nombre de côteaux ceints d'épaisses haies vertes, que l'épine-vinette décore tour à tour".
. Il y a là des moulins, des cabarets, des tonnelles, des Élysées champêtres et des ruelles silencieuses bordées de chaumières, de granges et de jardins touffus, des plaines vertes coupées de précipices, où les sources filtrent dans la glaise, détachant peu à peu certains îlots de verdure où s'ébattent des chèvres qui broutent l'acanthe suspendue au rochers; Des petites filles à l'air fier et au pied montagnard les surveillent en jouant entre elles. On rencontre même une vigne, la dernière du cru célèbre de Montmartre, qui luttait, du temps des Romains avec Argenteuil et Suresnes. Chaque année cet humble coteau perd une rangée de ses ceps rabougris qui tombe dans une carrière. Il y a dix ans, j'aurais pu l'acquérir au prix de trois mille francs On en demande aujourd'hui trente mille. C'est le plus beau point de vue des environs de Paris. Ce qui me séduisait dans ce petit espace abrité par les grands arbres du Château des Brouillards, c'était d'abord le reste de vignoble lié au souvenir de Saint Denis, qui au point de vue des philosophes était peut-être le second Bacchus...".
16:53 | Lien permanent | Commentaires (0) | | |
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Digg
12/01/2011
Quelques domiciles de Gérard de Nerval dans le 9° arrondissement.
PAR BERNARD VASSOR
(Copyright 2007)

Le Salon d’Alfed Tattet, 10 rue de la Grange Batelière, reçu souvent dans les années 1830, les hugolâtres du cénacle de Jehan Duseigneur, au rang desquels Gérard Labrunie figurait en bonne place. C’est à partir de 1837, que nous trouvons la trace d’un premier logement de Gérard dans notre arrondissement. Il habite alors 91 rue Coquenard (Rodier), il présente cette année là Auguste Maquet à Alexandre Dumas chez lui, fin novembre 1838. Il déménage le 1 mars, pour le 15 rue Taitbout. De retour d’un long voyage en Europe, il est hébergé par Théophile Gautier 14 rue de Navarin (un témoin mentionne sa présence au 2 rue de Navarin, dans un minuscule appartement). Transporté en 1841 chez le docteur Esprit Blanche rue Trainée (rue Norvin) à Montmartre après une crise de folie et deux internements, il loge provisoirement au 13 rue Le Peletier. Après plusieurs voyages et divers appartements dans d’autres quartiers de Paris, nous retrouvons Nerval 6 rue Neuve-Pigalle en 1844, puis la même année, au 15 rue de la Victoire. 1846 le voit locataire d’un logement 16 rue de Douai. En 1849, après une nouvelle crise, il est logé chez le docteur Audanson 48 rue Notre-Dame de Lorette où nous le retrouvons une nouvelle fois en 1850. En 1851, à la suite d’une chute, il est soigné au 9 rue Montyon. En 1852, le docteur Stadler 24 rue Bréda (Henri Monnier) soigne le poète chez lui pour un érysipèle et « une fièvre chaude ». Nerval a son adresse 66 rue des Martyrs quand il fait une rechute pour être soigné à la maison Dubois. Après un séjour à la maison municipale de Santé Dubois, c’est au 2 rue du faubourg Montmarte que Gérard réside très peu de temps en 1853. Il collabore cette année là au « Mousquetaire » de Dumas au 1 rue Lafitte, dans l’immeuble de la « Maison dorée ». Alexandre Dumas, qui habite là, est réveillé une nuit par un policier qui lui signale qu’un nommé Labrunie le réclame au commissariat où il avait été conduit après avoir été trouvé se promenant nu sur le boulevard Montmartre. Dumas vient le chercher en voiture pour le recueillir chez lui. Il est ensuite conduit à la maison du docteur Meuriot à Passy « dans un état de délire furieux » C’est donc le 2 rue du faubourg Montmartre, le dernier domicile connu de Gérard dans le neuvième. Ajoutons qu'à plusieurs reprises, Gérard mentionne ses visions dans l'église Notre-Dame de Lorette et bien entendu, tous les appartements d'Alexandre Dumas entre 1830 et 1855 dans le neuvième, de l'impasse des Trois Frères à la rue Saint-Lazare.
Mise à jour le 12/01/2011
11:19 | Lien permanent | Commentaires (0) | | |
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Digg
10/01/2011
Sur la mort de Gérard de Nerval, rue de la Vieille Lanterne.
PAR BERNARD VASSOR
Ce dernier portrait,fin 1854, début 1855, peu avant sa mort par Félix Nadar, ou Adrien Tournachon son frère,113 rue Saint-Lazare ?.
Après de nombreuses versions déjà publiées sur ce blog, voici celle d'Alexandre Dumas, qu'il semble avoir écrite en 1866, 11 ans après le "suicide" de la rue de la Vieille Lanterne. Cette version bien sûr, contredit les documents officiels (procès-verbal du commissariat de police Saint-Merri) que nous avons déjà évoqué.
Notre ami Alexandre père, conteur impénitent, mis sa patte à cette nouvelle histoire et en donna sa version.
C'est dans un texte intitulé Nouveaux Mémoires : Sur Gérard de Nerval, Edtions Complexe, 1990.
Dans ces Mémoires "inédits", Dumas raconte que le vendredi matin 26 janvier, il fut réveillé par le porteur d'une lettre d'Arsène Houssaye lui annonçant la mort de Gérard dans un accès de folie, lui demandant de venir le rejoindre rue de la Vieille Lanterne. Ce que fit Alexandre en toute hâte. Arrivé sur place, il décrivit les lieux :
"Alors la rue se rétrécit. On lit en grosses lettres sur un mur en face :
BAINS DE GESVRES
et au dessous :
BONDET (sic)
entrepreneur de serrurerie.
Au pied du mur sur lequel sont inscrites ces deux affiches, commence un escalier avec une rampe de fer.
Escalier visqueux ,étroit, sinistre, un prolongement de la rue conduit à la boutique d'un serrurier qui a pour enseigne une grosse clé peinte en jaune.(...)dans l'obscurité au fond, vous découvrez une fenêtre cintrée avec des barreaux de fer pareils à ceux qui grillent les fenêtres des prisons. Vous y êtes, c'est à ce croisillon de fer que le lacet était attaché. Un lacet blanc comme ceux dont on fait des cordons de tablier. (...)C'est là, les pieds distants de cette marche de deux pouces à peine que le vendredi 26 janvier 1855 au matin, à sept heures trois minutes, ( notez la précision !) juste au moment où se lève cette aube glaciale des nuits d'hiver que l'on a trouvé le corps de Gérard encore chaud et ayant son chapeau sur la tête.(...)Les gens qui les premiers le virent, n'osèrent pas le détacher, quoique l'un d'eux fit observer qu'il n"était pas mort puisqu'il bougeait encore la main (...) On alla chercher le commissaire de police, M. Blanchet, et un médecin dont j'ignore le nom. Le corps était encore chaud. Le médecin pratiqua une saignée, le sang vint; mais Gérard ne rouvrit pas les yeux. Nous allâmes de la rue de la Vieille Lanterne à la morgue où le corps avit été déposé. De l'endroit où Gérard s'était pendu, jusqu'à la morgue, il n'y avait qu'un pas.
Le récit se poursuit avec la description du cadavre de Nerval, vêtu seulement d'un pantalon, le torse nu, puis les démêlés sordides dans ces circonstances avec Gautier et Houssaye à propos des funérailles, et de l"élévation d'une stèle sur sa tombe.
Cette estampe de son ami Célestin Nanteuil fut publiée dans "L'Artiste" avec la légende suivante :
"N'est-il pas étrange de penser que Gerard de Nerval, qui a marqué de l'empreinte de son pied hardi, au haut des cascades de Tivoli, des glaciers du Saint-Gothard et des dangers du Vésuve soit venu se briser à ce sombre écueil"
La ruelle sera démolie peu de temps après la mort de Gérard.
LA MORGUE DU MARCHE-NEUF
C'est Asselineau qui fut prévenu de la mort de Gérard par la Morgue ou la police. Un fragment de carte de visite avait été retrouvé dans la poche de Nerval.
REGISTRE DE LA MORGUE :
"Arrivée du corps à 9 heures et demie du matin de Labrunie Gérard dit Nerval, demeurant 13 rue des Bons-Enfants; vêtements et objets :
un habit noir, deux chemises en calicot, deux gilets de flanelle, un pantalon en drap gris vert, des souliers vernis, des chaussettes en coton roux, des guêtres de drap gris, un col noir en soie, un chapeau noir, un mouchoir blanc.
Genre de mort : suspension (..) suicide; cause inconnue (..) cadavre trouvé sur la voie publique rue de la Vieille-Lanterne (..) cet homme était connu avant son entrée à la Morgue (..) le corps a été réclamé par la Société des Gens de Lettres(...)."
Procès-verbal du commissariat de police de Saint-Merri :
"Ce matin, à sept heures et demie (26 janvier 1855) le dénommé (..) a été trouvé pendu aux barreaux (à l'enseigne) de la boutique d'un serrurier (Boudet) rue de la Vieille Lanterne, déclaration de Laurent, sergent de ville du quatrième arrondissement; l'individu était déjà mort, transporté au poste de l'Hôtel de Ville, secouru par deux médecins, mais en vain. Il, s'est pendu avec un ruban de fil, son corps était attaché aux barreaux avec le lien, aucune trace de violence sur le cadavre"
Le 29 janvier 1855, le préfet de Police, donnait l'autorisation de remettre la dépouille de Gérard à Balard, délégué de la Société des Gens de Lettres.
Le même jour, le commissaire de Police donnait l'autorisation au sculpteur Auber, de mouler ou daguerréotyper les traits de Gerard de Nerval. D'après une lettre d'Auguste Luchet**, il semblerait que le masque et la photographie aient été réalisés un jour avant que l'autorisation ne lui fut accordée. Jusqu'à ce jour, nous n'avons aucune trace de ces éléments....
D'après les chroniqueurs de ce temps,la température cette nuit-là, était de moins dix-huit degrés.
*Archives de la préfecture de Police
**Auguste Luchet, maçon, de la loge Saint Vincent de Paul, avait annoncé la mort de Gérard de Nerval à Godfroy, Louis Ulbach François Favre en ces termes : "M. Auber sculpteur distingué à tous les titres, a bien voulu se charger de reproduire les traits de notre malheureux frère...".C'est moi qui souligne ce passage. Tous ces noms cités sont ceux des futurs (en 1858) créateurs de la revue "Le Monde Maçonnique". Il semblerait donc que Gérard fut du nombre des frères de la loge 113 ???
BnF (Smith-Lesouëf. Res 3683 )
Source principale :
Exposition à la BHVP (1996), Commissaire Eric Buffeteau, qui m'a promis des révélations pour bientôt,
A suivre....
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