Référencement gratuit

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

29/04/2008

LES BRASSERIES DE FEMMES, OU BRASSERIES A FEMMES ? LIEUX DE REUNION, DE LA BOHEME LITTERAIRE, MAIS AUSSI LE LIEU OU L'ON POUVAIT A LA FOIS SOUFFRIR D'ABSINTHISME, MAIS AUSSI REPARTIR AVEC LA SYPHILIS EN PRIME

PAR BERNARD VASSOR

604c57af7d4ec64014beb6e233580f1f.jpg

C'est avec un petit peu de gêne* que je dois reconnaître que l'endroit où Vincent fit sa première exposition, et entraîna le père Tanguy, fut ce lieu de prostitution camouflée. Etabli en 1884 rue de Richelieu par Augustine Ségatori, la maison se transporta boulevard de Clichy en 1885. La faillite l'obligea à fermer ses portes dans le courant de l'année 1888.

Les brasseries de femmes

C'est lors de l'exposition universelle de 1867 qui vit s'ouvrir ce genre d'établissement.

La première brasserie de ce genre vit le jour rue des Maçons-Sorbonne, devenue rue Champolion. Son nom était : "La brasserie de l'Espérance" et employait quatorze fille. Aussitôt baptisée par les étudiants les Quatorze fesses.

Le succès fut foudroyant, tout Paris fut conquis par ce concept original. Les femmes avaient remplacé les garçons de café. Chaque brasserie avait un thème : ici c'étaient des femmes court vêtues déguisées en allemandes, en alsaciennes, en espagnole, en tout ce qui pouvait être exotique, donnant ainsi l'appellation de l'établissement, le client pouvait être servi en face du Palais de justice par des serveuses en robe d'avocat. Sur l'affiche du "Tambourin", ce sont des bolonaises qui officiaient rue de Richelieu; au Tambourin à Montmartre, c'étaient des tziganes. Bien souvent des écrivains et des journalistes et même des peintres, se réunissaient dans ces brasseries pour organiser leurs réunions et créer ainsi des sociétés fantaisistes dont il a été question dans de précédents articles. C'est là que sont nés les clubs les plus insolites de la seconde moitié du dix-neuvième siècle.

On a pu ainsi dénombrer au quartier latin "Le Sherry-Cobbler" 54 boulevard Saint-Michel près du lycée Saint-Louis. C'est là qu'Emile Goudeau rencontra ceux qui allaient devenir membres des Hydropathes. Dans l'ouvrage déjà cité : Dix ans de Bohème d'Emile Goudeau (éditions Champ Vallon) nous apprenons que Goudeau fréquentait aussi le restaurant Turco-Grec, rue Monsieur-le-Prince, le Petit Truc, boulevard Saint-Germain. Il y avait la Brasserie du-Tire-cru ou Tire-cul selon les goûts ! Un des plus anciens cabarets de Paris fondé en 1325, Le Pantagruel, qui avait été fréquenté par l'ancien "curé de Meudon" à l'emplacement actuel du 47 rue des Écoles, fut transformé en brasserie coquine. La Brasserie de la Seine, 27 quai Saint-Michel, ce sont des serveuses travesties en ramoneur qui vous servaient des bocks.

Ces établissements, maisons de tolérance déguisées qui bénéficiaient d'une curieuse mansuétude de la préfecture de Police. Les filles et les "tauliers" n'étant pas soumis aux mêmes règles que les bordels. Ni sur le plan juridique, les filles n'étant pas obligées d'être déclarées, et les locaux n'ayant pas les obligations d'hygiène imposées aux maisons closes.

Tout ceci bien sûr en échange de renseignements fournis à la police des mœurs qui transmettait les informations à la répression du banditisme, et au cabinet noir du préfet de Police. 

Le préfet Gustave Macé, établit une différence entre les Brasseries de femmes, et les Brasseries à filles et les Brasseries à billards.

Dans la catégorie des Brasseries à filles, il indique celles du boulevard Saint-Michel que les étudiants appelaient d'après lui "Le marché aux veaux". Il situe les Brasseries de femmes surtout dans le quartier Bonne-Nouvelle

 

 
702db43e6bc6fd749510a529faf58cc9.jpg

Quelques étudiants bien comme il faut, décidèrent fin avril 1883, "d'assainir" le Quartier Latin. Des affichettes multicolores collées sur les vespasiennes du cinquième et sixième arrondissement convoquaient le public pour une réunion salle de L'Hermitage. A l'ordre du jour : "Mesures à prendre contre la prostitution clandestine".

La réunion fut tumultueuse, le premier à prendre la parole un certain Philibert, bafouilla quelques arguments où il y fut question de régénérer la France, quelques étudiants facétieux entonnèrent "Esprit saint descendez en lui". Le deuxième orateur s'étonna qu'un aussi jeune garçon ait des pruderies de vielle anglaise. Les discours se succédèrent au beau milieu d'un chahut, de chansons paillardes. A dix heures trente, deux jeunes filles supposées être des serveuses à sacoche sont portées en triomphe sur la scène où l'on chasse les assesseurs pour leur offrir leurs chaises....

 

b99b1abdd8bbfa61335589ab9a9783f0.jpg
Les habitants du neuvième arrondissement n'étaient pas les plus mal lotis.....
.....................
Des statistiques de la préfecture indiquent qu'il y avait quarante brasseries ayant cent vingt filles et en 1879, cent trente brasseries (déclarées) servies par cinq cent quatre-vingt -deux femmes dont voici le détail en 1879 :
5608cb176fdb7621f049b4a4892904e1.jpg

certaines disposent même au sous-sol de cabinets destinés aux visites des clients.  Dans la brasserie, des bourgeoises pour s'encanailler, viennent parfois rivaliser avec les filles. Dans un grand nombre de brasseries, une pièce officiellement destinée à servir de chambre à coucher à une bonne, est louée par le patron à l'heure, qui donne la clé de la chambre contre monnaie sonnante. Jusqu'aux sous-sols isolés ayant  officiellement pour objet de pouvoir s'isoler pour étudier servent en réalité aux ébats tarifés. L'imagination n'avait pas de limites, certaines brasseries étaient servies par des femmes déguisées en religieuses. Le maître des lieux obligeait les filles à payer leurs costumes. Les caissières offraient aux habitués des photographies obscènes des serveuses les plus accortes. 

Un syndicat créé pour la profession éditait un journal, avec la liste des établissements destinée aux touristes et aux étrangers, avec la spécialité de chaque maison. Des prospectus illustrés de façon suggestive distribués à la sortie des salles de spectacle invitaient les touristes à terminer la nuit (jusqu'à deux heures du matin en principe) dans un endroit  plutôt accueillant. 

LA FINANCE ET LA POLITIQUE

Plusieurs brasseries étaient commanditées par des hommes politiques, ayant pour souteneurs quelques financiers ayant pignon sur rue. Quelques gérants, hommes de paille, étaient recrutés par des déclassés, des professeurs, des musiciens sans talent, des institutrices, des sages-femmes, des directrices d'agence matrimoniales etc.

Les filles ne reçoivent aucun salaire, ce sont elles qui sont obligées de verser une redevance en espèces, ou bien parfois en nature pour avoir le droit de servir. En prenant leur service, elles devaient payer "la casse" et un supplément pour le nombre de tables qui leur étaient confiées. Chaque retard ou chaque faute était taxé d'une amende. Le "travail" commençait à trois heures de l'après-midi, jusqu'à la fermeture à deux heures du matin. D'après le préfet, elles gagnaient en moyenne entre cinq et vingt francs par jour. Celles qui ne devenaient pas folles, par l'abus d'alcool sont frappées par la phtisie ou la syphilis, terminaient leurs jours misérablement.

Avant la naissance des brasseries de femmes, existaient déjà des débits de boissons particuliers. Le café de la Mère Moreau place de l'Ecole, mettait déjà en avant les serveuses les plus jolies en vitrine avant les années 1840. Plus tard des cafés appelés "caboulots" employaient des filles de comptoir nuisibles à la morale publique. Le préfet Boittelle en avait établi la règlementation.

Mais, c'est une autre histoire.........

 

Les commentaires sont fermés.