Par Bernard Vassor
A MONTMARTRE LE SOIR
Préfet de la Lozère, puis de l’Eure 1853-1868
Né à Angers le 27 mars 1823, mort à Paris le 26 février 1884. Il entra en 1850 comme sous-préfet de Saint-Etienne. Promu préfet de la Lozère, il passa en 1856 à la preéfecture de l'Eure où il acquit par ses procédés administratifs une célébrité presque légendaire. Signalé par son zèle électoral, il donnait des subventions sans compter, donnait des fêtes, faisait largesse des ressourves du département; on comptait en 1867 un passif de la préfecture de 700 000 francs. A la suite d'une altercation avec un membre du conseil général à qui il avait donné un soufflet, il fut mis en disponibilité après avoir été condamné à 3000 francs d'amende. En 1869, le ministre de l'Interieur M.Forcain de la Roquette lui offrit la préfecture du Gard, qu'il échangeat quelques mois plus tard pour celle du Morbihan. Remis en disponibilité en janvier 1870, il revint à Paris et fut avec son ami le duc d'Albuféra un des membres les plus acdu comité plébiscitaire de la capitale. Pendant la guerre il se retira en Suisse. Le nouveau gouvernement de Thiers s'occupa de ses actes commis pendant son passage à la préfecture de l'Eure et lança contre lui un mandat d'arrêt sous l'inculpation de faux en écritures. Arrêté à Genève en 1871, il fut extradé et conduit à la prison de Rouen. Il comparut le 1 janvier 1872. Le témoignage de monsieur Pouyer-Quertier, ministre des finances, cité comme témoin à décharge fit acquitter l'accusé. Ce qui provoqua un tel scandale, que le ministre complaisant fut contraint à la démission. La cour des comptes exigeat le remboursement de 110,832 francs dont il n'avait pu justifier l'emploi...En janvier 1874 Eugène de la Motte fonda à Angers un journal, puis il repris la direction du parti bonapartiste et se présenta comme candidat du "Comité national conservateur" aux législatives de 1876; il fut élu député de l'arrondissement de Bernay. Il fut réélu jusqu'à sa mort membre du conseil général de l'Eure. Il était officier de la Légion d'honneur depuis le 26 décembre 1862.
Un procès eut lieu à la Cour d’assises de la Seine-Inférieure du 26 février au 4 mars 1872.. Ce scandale dévoila au grand public la vie dissolue avec des filles publiques et les malversations financières du magistrat de la préfecture d’Evreux. Fort heureusement, il fut acquitté !!!
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Blason Janvier de la Motte : D'azur à un vol d'argent
Journal des Goncourt T I p 1128 , 25 décembre au Château d’Osmoy : Le préfet d’ici, un fameux Janvier, a une réputation telle qu’ayant accordé un autel de 500 francs à Mme d’Osmoy a dit à Mme d’Osmoy : « je ne dirai pas que c’est vous qui l’avez obtenu parce que ça vous ferait du tort à votre réputation. Je dirai que c’est monsieur lle comte » Il y a quelque chose de curieux à faire du fils d’un Janvier ou d’un Houssaye, d’un fils élevé par les putains de son père, puisant à cette éducation d’une dépravation particulière, une originale et admirable corruption féminine. »
T II p 504 et 813 le 24 mars 1872 : "Hier à sa table (Victor Hugo) il prenait la défense du préfet Janvier." 18 janvier 1879, Edmond de Goncourt ne peut s’empêcher d’évoquer la différence de traitement avec « Henriette Maréchal » écrit avec une pointe de jalousie : à la première de L’Assommoir : « Il y a là des gens de toutes sortes, Busnach avec sa tête de veau, le vieux Janvier, qui a conservé sous un air de jeunesse son teint brouillé de coquin (..) Chabrillat allant voir les journalistes qui soupent au-dessous au milieu de la lecture de fragment d’un grand article devant paraître le lendemain, au milieu de racontars d’après lesquels un contrôleur aurait envoyé se faire f…. le préfet de Police."
Il fut néanmoins élu député bonapartiste de Bernay de 1876 jusqu’à sa mort en 1884.
C'est la première adresse qui figure dans le dossier du préfet. C'est là qu'il fut mis en rapport avec l'actrice des Délassements Comiques Mlle Crénisse par la proxénète madame Lang qui vivait là dans le garni du 65 rue Pigalle.
En 1860, l'actrice est domiciliée 80 rue Blanche "dans un appartement à deux mille francs par an qui est meublé avec luxe"
La première épouse du préfet avait fait surprendre son mari avec "la Crénisse"à l'hôtel de l'Europe . Elle obtint la séparation en 1861. Elle meurt en 1865 et laisse son mari libre de se remarier en octobre 1866.
Après plusieurs maîtresses, il entretient Blanche Pierson (de la Comédie française). C'est ensuite au tour d'Henriette Renoult, vendue par sa propre soeur Hélène avec qui elle demeurait 40 rue d'Enghien. Il a eu un enfant avec cette fille qui a vécu ensuite rue Baudin (aujourd'hui Pierre Sémard) puis rue Lafayette. Le préfet ne se contentait pas des filles publiques, il faisait venir d'Evreux des dames de la haute société pour qui il louait un appartement au Grand-Hôtel où il organisait des soirées orgiaques qui lui coûtaient une fortune. Il empruntait de l'argent à un agent d'affaire Pinguet avec qui il était très lié de la rue de Monthyon au numéro 11. (Il y avait au 14 de cette même rue un bordel célèbre qui ne fermera ses portes qu'en 1946).Il avait un autre maîtresse qui habitait 72 rue de Naples nommée Dahmen.
Le digne fils du préfet Louis, sur les pas de son père, fit une carrière politique comme député du Maine et Loire de 1876 à 1894. Il était en relation avec la proxénète Louise Clémence Flavie Toussaint née à Arras, dite "la Prat" bien connue des services de la rue Sainte Anne. Elle demeurait 9 rue Mosnier. C'est aujourd'hui la rue de Berne depuis 1884. Mosnier étant le nom du propriétaire du terrain qui avait fait ouvrir cette voie. Elle était située à côté de l'atelier de Manet rue Saint Petersbourg.
ÉDOUARD MANET LA RUE MOSNIER